Pour sa nouvelle enquête portant sur l’agriculture, Élise Lucet a choisi de s’intéresser au secteur semencier. Dégradation des apports nutritionnels des légumes, appropriation du vivant par les industriels et travail des enfants : une fois de plus, Cash Investigation est allé loin. Trop au goût de certains. Si Élise Lucet est loin de faire l’unanimité, une chose est certaine : elle sait créer le débat.

Les entreprises contre-attaquent

Au sein des acteurs de la filière des semences remise en cause, pas question de se laisser intimider. Limagrain est pointé du doigt par l’enquête concernant le travail des enfants chez ses prestataires indiens et la commercialisation de semences non-inscrites auprès de ses adhérents.

Par un communiqué, l’entreprise dément en bloc ces accusations. Elle ajoute avoir donné « tous ces éléments factuels à Cash Investigation avant la diffusion du reportage », et regrette que « ceux-ci n’[aie]nt pas été repris au montage ».

Après l'émission #CashInvestigation, Limagrain répond.
Tolérance zéro sur le travail des enfants & respect scrupuleux du droit du travail en Inde
Priorité à la diversité et au goût
Strict respect de la réglementation sur les semences fournies aux agriculteurs de la coop

— Limagrain (@Limagrain) June 19, 2019

Le Gnis (interprofession des semences), également par voie de communiqué, explique s’être préparé à la « tonalité polémique » de l’émission. En guise de réponse à Cash Investigation, l’interprofession renvoie sobrement vers une foire aux questions disponible sur son site officiel.

Questions/Réponses sur le #GNIS & la filière #semences

Face aux idées reçues :
Nos réponses factuelleshttps://t.co/2UF0kbcPrN pic.twitter.com/Xi5tiQgLBJ

— GNIS (@gnis) June 18, 2019

Les indignés

Parmi les agriculteurs et représentants de la profession, de nombreuses personnes ont cependant vu dans cette enquête une nouvelle attaque envers le secteur agricole dans son ensemble.

@cashinvestigati⁩ il y a longtemps que mme ⁦@EliseLucet⁩ n’avait pas encore tapé sur l’agriculture et dire qu’ils étaient venus une journée chez moi il y a quelques années et qu’ils ont refusé de montrer ma façon de travailler pic.twitter.com/BXVtNPN3dT

— Christophe Grison (@agritof60) June 18, 2019

Version de décryptage

Thibault Fiolet, ingénieur et expert au sein de l’Efsa, a choisi, en réponse, d’offrir un contrepoint scientifique à l’enquête en citant de nombreuses sources et articles.

Décryptage de #CashInvestigtion "hold-up sur nos fruits et légumes"
Est-ce qu'ils ont perdu en qualité nutritionnelle ? les lobbys de l'agriculture et des semenciers ?https://t.co/dByGerUkZj#FactCheck #France2 pic.twitter.com/4XGNYTrE12

— Thibault Fiolet (@T_Fiolet) June 18, 2019

David Forge, le youtubeur à l’origine de moissonneuse.fr, a, quant à lui, rappelé l’existence d’une vidéo portant sur les variétés tournée par ses soins… dès 2016.

Bonsoir @BabethLemoine ,@cavousf5, @EliseLucet,

Suite à vos échanges de ce soir au sujet du @gnis, je souhaite apporter des informations complémentaires

J’ai créé cette vidéo qui explique pourquoi je m’appuie sur les diversités variétales => https://t.co/Hl9tvnrv8b pic.twitter.com/tWbi2C88s1

— David Forge (@d_forge) June 18, 2019

Loin du terrain, loin du cœur

Pour quelques internautes, Élise Lucet n’a pas laissé une part assez grande aux agriculteurs. On aperçoit bien de grandes serres de tomates, et quelques producteurs de blé auvergnat, mais l’émission aurait effectivement pu aller plus loin. L’intervention d’un maraîcher, concernant le coût de la semence sur son exploitation, n’aurait par exemple pas été inutile.

J’ai voulu jeter un œil à #CashInvestigation

Les commentaires sont totalement dingues c’est la foire au complotisme

Les gens, depuis combien de temps n’avez-vous pas pris le temps de parler à un agriculteur en vrai?

Vous en avez pourtant grand besoin

— Denis Beauchamp (@GrainHedger) June 18, 2019

Les satisfaits

L’émission n’a pas que des détracteurs. Elle a même reçu des félicitations de la part des médias de grand public, mais également de représentants politiques.

 

VIDÉOS. Privatisation du marché des semences, tomates hybrides... Quatre séquences à retenir du "Cash investigation" sur le business des fruits et légumeshttps://t.co/j7slr16Tw0 pic.twitter.com/937rcyxQDU

— franceinfo (@franceinfo) 19 juin 2019

Enquête saisissante de #CashInvestigation en ce moment sur @france2TV qui révèle comment les tomates perdent leur goût et leurs nutriments... Pour que les industriels gagnent gros !
Bon, une preuve de plus qu'il est temps de changer notre modèle agricole vers l'agro-écologie ! pic.twitter.com/HfmCbrptTB

— Manon Aubry (@ManonAubryFr) June 18, 2019

#CashInvestigation #Bretagne @EliseLucet a rencontré à Cancale, notre grand chef @ORoellinger pour échanger sur les semences paysannes qu’il cultive

« Si nous les cuisiniers les plus connus, nous ne sauvegardons pas le garde-manger de l’humanité : qui va le faire ? » pic.twitter.com/t6YHRMrI4I

— Cassandre Métayer (@cassandremetyr) June 18, 2019

Du côté du public, enfin, le bilan paraît mitigé. Europe 1 annonce 10 % de part d’audience, quand France 2 annonce 12,1 %. Dans l’un ou l’autre des cas, la performance ne serait pas exceptionnelle pour Cash Investigation par rapport aux saisons précédentes.

 

Pour ceux qui souhaiteraient se faire leur propre avis, l’émission de deux heures est disponible en replay sur le site de France Télévisions.