Les prix des céréales françaises diminuent encore cette semaine et cela va probablement profiter aux exportations françaises alors que les cours repartaient en légère hausse sur le marché mondial pour le maïs et le soja.
Les perspectives d’exportation s’améliorent
Le blé français a de nouveau vu son prix baisser cette semaine, à 165 €/t (- 3 €/t) rendu Rouen (base juillet) ce qui le conduit à 189 $/t sur le marché mondial (- 2 $/t). Suite à plusieurs chutes successives, il se retrouve désormais très proche du blé ukrainien, en position Fob (blé chargé sur un bateau), et à parité avec le blé russe à 11,5 % de protéines. Les blés français sont même nettement moins chers que les blés russes à 12,5 % alors qu’ils valaient encore 8 $/t de plus il y a un mois.
Cette situation souligne le regain de compétitivité effectué par les blés français au cours du mois écoulé, sous la pression d’une récolte abondante alors que, dans le même temps, les valeurs de la mer Noire se sont légèrement appréciées. Il s’agit d’un point notable, favorable aux exportations françaises. Une autre conséquence de ces évolutions de prix : les blés ukrainiens ne sont plus compétitifs à l’importation dans l’Union européenne ce qui devrait booster la demande intra-européenne, espagnole notamment, qui va s’adresser à la France.
Toutefois, sur le front européen, le blé français est confronté à des blés anglais dont le prix a fortement décru au cours des dernières semaines en raison de la baisse de la livre affaiblie par la probabilité croissante d’un Brexit sans accord. Les blés fourragers anglais de la récolte 2019, qui s’annonce très bonne, sont devenus potentiellement très compétitifs à destination du Sud de l’Union européenne. Ils pourraient gagner quelques parts de marché vers les pays tiers. La crainte des opérateurs concernant les échanges après le 31 octobre prochain (date du Brexit) devrait cependant limiter l’ardeur des importateurs de blé anglais à l’intérieur de l’Union européenne.
L’Arabie restreint ses exigences qualitatives
Sur un autre front, l’Arabie Saoudite vient d’annoncer qu’elle autorisait dorénavant un taux de 0,5 % pour le « bug damage » (infestation de punaises) des blés qu’elle va importer au lieu de 0 % auparavant. Avec cette nouvelle tolérance, les blés de la mer Noire, russes principalement, vont maintenant pourvoir répondre aux appels d’offres. Ils rentreront ainsi en compétition avec les blés européens à teneur élevée en protéines (12,5 %), baltes, allemands et polonais, qui desservent habituellement l’Arabie.
Cette mesure, dans la foulée d’accords conclus sur le pétrole, apparaît hautement politique. Elle a affolé les marchés européens hier puisqu’elle va induire une plus forte concurrence sur une destination qui était encore une « chasse presque gardée » de l’Union européenne. Il faut cependant noter, dans une situation où le disponible exportable russe est en cours de révision à la baisse, que les blés russes ne sont pas bon marché par rapport aux blés baltes ou allemands actuellement. Cela devrait limiter à court terme l’appétit saoudien pour cette « nouvelle » origine permise.
À plus long terme en revanche, cela constituera un élément de pression sur le prix des blés européens. Point saillant cette semaine également : le ministère de l’Agriculture marocain a publié une nouvelle estimation qui vient confirmer un niveau très bas de sa récolte de blé tendre (moins de 3 millions de tonnes). Ce qui va obliger ce pays à importer beaucoup cette année et devrait profiter aux exportations françaises.
Concurrence anglaise pour l’orge
Poussés par une récolte mondiale plus forte que prévu, que ce soit dans l’Union européenne ou en mer Noire, les prix de l’orge sont restés influencés à la baisse cette semaine. Rendu Rouen, la céréale perd 3 €/t à 153 €/t (base juillet) ce qui la conduit à 176 $/t sur le marché mondial (Fob Rouen), à un niveau inférieur aux prix de la mer Noire : 183 $/t pour les orges russes et ukrainiennes.
Comme en blé, outre l’effet de l’ampleur de la récolte, les orges françaises sont tirées à la baisse par les orges anglaises qui se positionnent maintenant très en dessous en termes de prix (- 12 $/t). Pourquoi ? À cause de la baisse de la livre et des craintes des exportateurs anglais concernant les chargements vers l’Union européenne après le mois d’octobre. Le marché mondial sera très concurrentiel cette année, avec une bonne offre dans l’Union européenne et en mer Noire, alors que les besoins sont assez modérés chez les principaux importateurs (Arabie et Chine). Peu de changement sur le segment brassicole où les inquiétudes qualitatives restent de mise.
Dans l’attente des nouvelles statistiques de surface américaine
Après la baisse de la semaine dernière, le maïs français s’est stabilisé cette semaine, voire a légèrement baissé selon les places, valant 172 €/t Fob Bordeaux. Sur le marché mondial, le mouvement de baisse marquée s’est arrêté : la plupart des origines ont repris entre 3 et 5 $/t malgré les bonnes perspectives de semis en Amérique du Sud et une révision en hausse des surfaces ukrainiennes. Le marché mondial attend la publication lundi prochain des nouvelles estimations des surfaces américaine par l’USDA, le ministère américain de l’Agriculture.
Bien que le bilan mondial puisse supporter sans problème une forte baisse de la récolte américaine, les opérateurs sont de nouveau en alerte au cas où les surfaces seraient nettement plus basses que ce qui est anticipé actuellement. C’est la raison principale qui a poussé les prix mondiaux vers le haut cette semaine.
Le soja américain reprend son souffle
La récente intensification du conflit commercial entre les États-Unis et la Chine a lourdement pesé sur le prix du soja américain qui a continué à reculer en début de semaine à son plus bas niveau depuis fin mai. Ensuite, les prévisions d’un temps plus sec et chaud dans les principales zones de production du Midwest au cours des prochains jours ont apporté du soutien au marché après plus d’une semaine de baisse. Les opérateurs sont maintenant dans l’expectative en attendant le rapport mensuel sur l’offre et la demande mondiales de produits agricoles qui sera publié lundi par le ministère américain de l’agriculture.
Le volume de la nouvelle récolte pourrait être ajusté en baisse dans ce nouveau rapport.
Un autre élément s’est révélé plutôt haussier pour le soja américain cette semaine : il s’agit des rumeurs sur l’intention de la Chine d’acheter d’importants volumes d’huile de soja de différentes origines dont les États-Unis. Cela reste à confirmer prochainement. D’une semaine à l’autre, le prix du soja sur le marché à terme de Chicago progresse ainsi de 6,6 $/t à 317,8 $/t suite notamment au fort rebond enregistré hier (+ 6,25 $/t en seulement une journée).
Le colza français tiraillé
Depuis la semaine dernière, les cours de colza français n’ont pas beaucoup bougé. À Rouen, le prix est resté stable à 372 €/t. Il recule très légèrement en Fob Moselle (-1 €/t à 377 €/t) et sur Euronext (-0,5 €/t à 375,75 €/t). Le net recul de la récolte française se confirme d’une semaine à l’autre. Outre la baisse de la surface, les rendements sont également estimés à des niveaux largement en dessous de la moyenne quinquennale.
Les prix de colza avaient déjà intégré l’impact de cette baisse. Sur l’ensemble de la semaine, ils ont été tiraillés par la tendance haussière du complexe oléagineux (canola, soja et huiles) et la baisse des cours du pétrole. Ces derniers sont pénalisés par les tensions commerciales entre la Chine et les États-Unis. D’autre part, la remontée de l’euro face au dollar américain a empêché la hausse du prix de colza.
En ce qui concerne le canola canadien, les cours sont en nette progression depuis la semaine dernière (+ 6 $/t à 340 $/t). En effet, en plus de l’impact haussier du soja et des huiles, la demande intérieure en graine canadienne est dynamique grâce aux bonnes marges de trituration. Le canola canadien a également bénéficié de la baisse du dollar canadien face au dollar américain.
Le tournesol en hausse, déficit hydrique à surveiller
Le tournesol français est en hausse de 5 €/t à 330 €/t sur une semaine, soutenu par les craintes liées à l’impact de la chaleur et de la sécheresse sur le volume de la récolte. Si le déficit pluviométrique persiste notamment dans le Sud-Ouest, les rendements potentiels pourraient être sérieusement impactés.
Les conditions climatiques restent favorables en mer Noire. L’état des cultures est plutôt rassurant. Les tournesols sont en phase de remplissage maturité selon les zones de production. Le prix fob mer Noire est stable sur la semaine à 370 $/t alors que les prix intérieurs ukrainiens sont en recul de 5 $/t en raison de la pression de la nouvelle récolte et du ralentissement de la trituration.
Le prix du tourteau de soja à Chicago est en hausse de 2 $/t à 325 $/t. Les cours ont gagné 6 $/t jeudi dans le sillage de la graine. En revanche, le prix est en baisse à Montoir (-2 €/t à 320 €/t). Les disponibilités en tourteaux sont supérieures à la demande. Les acheteurs, disposants de stocks suffisants, sont peu présents.
À suivre : impact du regain de compétitivité des blés français, avancée et qualité des récoltes en mer Noire et dans l’Union européenne, conditions climatiques mondiales pour le maïs et le tournesol, conflit commercial entre les États-Unis et la Chine, évolution de la parité euro/dollar, publication par l’USDA des surfaces semées en maïs et soja le 12 août