«C’est en accompagnant d’autres maraîchers en difficulté à l’association Solidarité paysans Provence que j’ai réalisé que mon exploitation n’allait pas bien. » Georges Gomis s’est installé en maraîchage à Salon-de-Provence en 1987. Il augmente sa productivité, passant de 18 kg/m2 de tomates sous serre à 30 kg en cinq ans. 1991 sera une année record. Encouragé par ces résultats, entre 1989 et 1992, il investit 300 000 € dans une serre chapelle de 11 000 m2, puis dans un tunnel de la même dimension pour la salade. Et les ennuis commencent. En 1992, un blocus routier gêne les livraisons, en 1993, le choc pétrolier fait exploser la facture de fioul, tandis que les prix baissent inexorablement. « La chute a été rapide. Pour compenser, ma femme et moi avons produit plus et perdu davantage », analyse Georges.

Avec Solidarité paysans, il prépare une procédure judiciaire fin 2001 et un plan de redressement sur quatorze ans : « Nous n’avions pas de dettes chez nos petits fournisseurs. Nous avions une dette sociale, fiscale et des impayés à la banque. Quand nous sommes arrivés au tribunal, je n’en menais pas large dans le petit bureau. Mon avocate m’a expliqué qu’elle parlerait pour moi. Le juge ne m’a jamais adressé la parole. »

La période d’observation est prononcée pour six mois au printemps 2002 : l’année est bonne, la trésorerie saine. « J’étais soulagé. J’ai remis la serre à niveau avec du matériel d’occasion. Nous avons obtenu six mois d’observation supplémentaires qui ont conforté le plan. »

Négociations

La dette (230 000 €), dont les trois quarts se répartissent entre la banque et la MSA, est renégociée en particulier auprès de la banque. Les annuités évolueront de 14 000 € les premières années à 25 000 € au bout de quatre ans. Avec les dettes hors plan, ils rembourseront jusqu’à 30 000 €. « Fiscalement, ce n’était pas une charge en comptabilité mais un revenu exceptionnel sur lequel on payait des cotisations à la MSA. Nous avons été soutenus par Francis Thomas, de Solidarité paysans », souligne Brigitte Gomis. La fin du plan a été validée en 2015 par le tribunal.

Nouveau départ

Dès 2002, Georges réfléchit à un autre système de production de légumes plus diversifié. Ils entrent dans le système Amap et se convertissent au bio. « Nous n’avons pas pris de vacances ces années-là mais nos enfants ont pu étudier. Nous avons participé progressivement à cinq Amap et je suis devenue salariée de l’EARL de mon mari », se souvient Brigitte.

En 2015, la procédure achevée, ils vendent leurs serres à un voisin, créent la nouvelle EARL Plantule, dont Brigitte est chef d’exploitation et Georges conjoint-collaborateur : « Nous produisons des plants sur commande et louons une partie de la serre à notre voisin. Nous allons poursuivre cette activité pendant cinq ou six ans. Je me suis toujours dit qu’un autre monde était possible. Mes enfants ont choisi un autre métier. Mais je vais transmettre autrement, en devenant formateur », conclut-il.