Deux femmes aux forts caractères. Voilà comment se définissent Marie-Rose Cayre-Castel et sa fille Sylvie Farfat. Cette association à la tête du Gaec de la Ferme de Chabrat, sur les hauteurs de Terrasson-Lavilledieu (Dordogne), fonctionne sans trop d’étincelles. Marie-Rose a pris les rênes de cette exploitation familiale presque centenaire par un concours de circonstances, en janvier 1988 : « Je n’y étais pas prédestinée. » Pour sa fille, c’est tout le contraire : « J’ai toujours su que je travaillerai ici. Enfant, je passais mes loisirs sur l’exploitation avec mon grand-père. En classe de cinquième, ma demande s’est fait plus précise. J’ai dit que je voulais arrêter les cours pour reprendre la ferme. Ensuite, j’ai fait plusieurs stages, pour voir si cela me plaisait. Avant de m’installer, j’ai été aide familial pendant cinq ans. » Et c’est en octobre 2014 que Sylvie s’est associée en Gaec avec sa mère.

Le Gaec élève des volailles à rôtir commercialisées en direct. © Claude Hélène Yvard

3 500 poulets, 800 pintades, 300 canettes

Pendant une quinzaine d’années, Marie-Rose Cayre-Castel a assumé seule la destinée de l’exploitation familiale : elle y a développé une production de volailles de chair et à rôtir, abandonné les brebis dès son arrivée. Ayant exercé une activité dans le commerce, elle fait, dès le début des années 1990, le choix de la vente directe, notamment sur les marchés de producteurs de pays. « C’était une nécessité de trouver des prix plus rémunérateurs et je souhaitais être en contact direct avec les clients », souligne Marie-Rose. Les deux agricultrices possèdent un cheptel bovin allaitant de race limousine d’une trentaine de vaches. « Les broutards sont commercialisés auprès d’un négociant en bestiaux de Corrèze qui vient nous les acheter à la ferme », précise Marie-Rose.

Au Gaec Ferme de Chabrat, on élève, abat et transforme des volailles à rôtir (poulets, pintades et canettes). La production annuelle tourne autour de 3 500 poulets, 800 pintades et 300 canettes. Cette gamme est complétée par quelques oies, chapons et dindes pour les fêtes de fin d’année.

Depuis vingt ans, le Gaec élève vend aussi sur des marchés parisiens. © Claude Hélène Yvard

Vente sur les marchés

Toutes les volailles sont écoulées en vente directe sur le marché de Terrasson le jeudi matin et celui de Brive le samedi matin. S’y ajoute des marchés événementiels en région parisienne et la boutique de producteurs de pays de Salignac-Eyvigues. En période estivale, les deux associées participent régulièrement aux marchés de producteurs de pays. « Cette année, plusieurs marchés ont été annulés en raison de la crise sanitaire, mais nous avons observé une progression des ventes à la ferme pendant et après le confinement, ajoute Marie-Rose. On verra si la tendance se confirme. » En fonction des saisons, elle propose aussi des cakes et des gâteaux aux noix : « J’ai eu envie de retrouver de vieilles recettes de toujours. » C’est aussi l’occasion de valoriser les arbres fruitiers de l’exploitation : le bon sens paysan s’exprime ainsi sur l’étal de Marie-Rose.

La poule Henri IV

À l’occasion de son arrivée, Sylvie a souhaité avoir sa propre production. Elle a envisagé de créer une ferme-auberge, mais la lourdeur des contraintes ont mis fin au projet. « Je voulais apporter une plus-value à l’exploitation, explique Sylvie. Je me suis lancée dans la production de la poule Henri IV. Ce sont des poulettes que je sélectionne bien rondes, bien charnues. Je les garde deux ans en production. Cela donne une poule pas trop grasse, bien en chair. Je les vends en direct. De plus en plus de consommateurs recherchent des produits nobles, des produits d’antan et d’une grande typicité. » La jeune agricultrice en fait 350 à 450 par an et a du mal à répondre à la demande en forte croissance, notamment parisienne.

En six ans, les deux femmes ont appris à travailler côte à côte. « Maman est plutôt une administrative, moi je m’occupe des volailles ou du travail en laboratoire, mais on essaie d’être polyvalentes, au cas où l’une aurait un souci, de santé ou autre, confirme Sylvie. Demain, je peux prendre la gestion des papiers en cas de besoin ou si elle le souhaite. » D’ici à cinq ans, la jeune femme, âgée de 36 ans, devra assurer seule l’avenir de l’exploitation.

Claude-Hélène Yvard