« Depuis 2019, nous voulions sortir des sentiers battus pour mieux valoriser notre production de lait, livré en totalité à Sodiaal, expliquent de concert Sylvain et Richard Duchet, associés au Gaec du P’che à Sainte-Eugénie-de-Villeneuve en Haute-Loire. L’idée d’un atelier pour stériliser et conditionner du lait destiné à être vendu en direct a efficacement germé jusqu’à la mise en place de cette transformation, opérationnelle depuis mars 2023. »

Les deux frères exploitent 95 hectares (ha) de surface agricole utile (SAU) incluant des cultures et des lentilles vertes du Puy en AOP. Sylvain s’est installé en Gaec avec son père en 2004. La SAU et le cheptel sont alors doublés pour atteindre 95 ha et 60 vaches, le bâtiment et la salle de traite sont agrandis en conséquence. Richard, commercial en alimentation animale pendant quinze ans, remplace quant à lui son père en âge de retraite depuis janvier 2022.

Un pari osé

« Nous avons installé tout le matériel nécessaire dont un stérilisateur, une embouteilleuse, une fardeleuse, une étiqueteuse, un porte-palette dans un atelier lumineux, ouvrant sur une salle de stockage, poursuivent les éleveurs, qui apprécient la fonctionnalité de leur outil. Moyennant une large part d’autoconstruction, l’investissement a été de 300 000 €, subventionné à 40 % sur 200 000 €. » La stérilisation et le conditionnement du lait sont effectués deux jours par semaine en mobilisant une personne de 6 h à 17 h, nettoyage de l’atelier y compris. 1 800 litres y sont alors conditionnés par jour.

Trois formats sont proposés par les éleveurs à leurs clients avec des poches de 5 litres pour 80 % de la production et des poches de 1 litre et des bouteilles en verre de 0,75 litre pour 10 % chacune du volume transformé. Un salarié a été embauché à mi-temps depuis 2024 pour les aider dans ce travail de transformation du lait. La conduite du troupeau dont les vêlages sont étalés toute l’année n’a pas été modifiée. L’alimentation répondant au cahier des charges de l’agriculture biologique depuis 2016 favorise une bonne richesse du lait en acides gras oméga-3.

Une demande croissante

Les glaciers du sud de la France affectionnent le lait du Gaec du P’Che pour sa qualité, son conditionnement et la livraison qu’assurent les éleveurs. Du lait entier plutôt que demi-écrémé leur permet de fait de diminuer leurs achats en crème. La longue conservation hors chambre froide d’un lait stérilisé est également un atout dans son utilisation par les professionnels et donc un argument de vente. Les magasins de producteurs, les boulangers-pâtissiers… comptent aussi dans la quarantaine de clients fidélisés localisés en Haute-Loire et sur les deux axes de la vallée du Rhône et de l’A75 en direction de Montpellier.

Les palettes de bouteilles en verre estampillées au nom et au logo du Gaec. (©  Monique Roque)

50 % du lait est livré par les associés, l’autre moitié par des transporteurs avec des départs en palettes depuis l’exploitation. « Une palette est même partie en bateau jusqu’en Guadeloupe », sourient les deux associés, qui confient aussi avoir la bosse du commerce depuis leur enfance, quand ils rendaient la monnaie au café du village tenue par leur grand-mère paternelle.

« Notre prévisionnel était de transformer 50 000 litres en année 4, ajoutent Sylvain et Richard. Avec 120 000 litres en 2025 (année 3), nous aurons largement dépassé nos objectifs, c’est évidemment une grande satisfaction. Nous aimons aussi beaucoup le contact direct avec nos acheteurs. Connaître le devenir de notre lait est une réelle motivation pour traire des vaches. Une fierté aussi. La valorisation qui en découle nous conforte dans le choix que nous avons fait car rien n’est jamais gagné par avance. Nous sommes aussi conscients qu’il faudra faire évoluer notre offre mais la lourdeur des cahiers sanitaires obligatoires pour tout projet de transformation nous freine dans l’immédiat. »