L’alimentation redevient le deuxième poste de dépenses des ménages en 2022, qui augmente de 14 % par rapport à 2020. Il s’intercale désormais entre le logement et les factures d’eau ou d’énergie, pourtant pas non plus épargnées par l’inflation. C’est du moins le ressenti qu’ont recueilli les Banques alimentaires à travers leur étude biennale sur le profil des requérants à l’aide alimentaire, rendue publique pendant le Salon international de l’agriculture le lundi 27 février 2023.
Un recours essentiel
Entre la précédente étude de 2020 et celle de novembre 2022, la crise sanitaire du Covid-19 et la hausse des prix ont totalement montré leurs effets. Comme plusieurs reportages à chaud l’avaient fait apparaître, l’aide alimentaire devient un recours essentiel. « C’est trop cher dans le commerce », expliquent la plupart des personnes interrogées. 60 % des requérants vivent à la campagne ou en périphérie urbaine.
Au total, 2,4 millions de personnes bénéficiaient de l’aide alimentaire à la fin de 2022, soit trois fois plus de personnes qu’il y a dix ans. « Depuis 2008, les différentes crises économiques et sanitaires se sont traduites par cette marée lente du recours à l’aide alimentaire qui n’a jamais reflué », explique l’étude.
Les travailleurs pauvres
La nouveauté de cette étude est l’éclatement des profils de ceux qui toquent à la porte des associations d’aide alimentaire. La grande majorité (83 %) reste des familles qui n’ont pas d’emploi. Avec un revenu de 850 euros par famille, mais seulement de 500 euros par unité de consommation, la quasi-totalité ne dépasse pas le seuil de pauvreté (60 % du revenu médian, c’est-à-dire 1 128 euros en 2022 pour une personne seule). Mais la précarité n’épargne pas ceux qui ont un emploi, autrement dit les travailleurs pauvres. Le revenu moyen des 17 % de requérants qui travaillent est de 1 070 euros.
L’équilibre alimentaire
L’enquête s’intéresse aussi aux raisons qui poussent à solliciter l’aide alimentaire. Bien sûr, le prix se manifeste par une demande accrue envers les produits ordinaires les plus onéreux comme la viande, le poisson ou les fruits et légumes. Il se traduit aussi par la récurrence des sollicitations : six personnes sur dix ont recours une à deux fois par semaine. Un chiffre en hausse de 6 points par rapport à 2020.
Mais l’aide alimentaire s’accompagne aussi d’une recherche d’un meilleur équilibre alimentaire. L’état de santé des personnes accueillies est bien plus mauvais que le reste de la population, avec une prévalence plus importante du diabète ou du surpoids. La prise de conscience semble implantée : 58 % se déclarent sensibles à l’équilibre alimentaire, en hausse de 6 points par rapport à 2020.
Sur le long terme, la demande de fruits et légumes est passée de 7 % en 2014 à 32 % en 2022. En l’espace de huit ans, la part des fruits et légumes distribuée est passée du 18 % à 24 % du total des produits distribués par le réseau des Banques alimentaires. Ce travail pédagogique, valorisé pendant les discussions sur le chèque alimentaire, se retrouve dans l’accompagnement social que prodiguent les associations d’aides, à travers des ateliers cuisine par exemple, qui contribuent à rompre l’isolement.
132 000 tonnes de produits alimentaires
Les Banques alimentaires collectent chaque année près de 132 000 tonnes de produits alimentaires auprès de la grande distribution, de l’industrie agroalimentaire, des agriculteurs et du grand public. Elles procèdent également à des achats de produits frais. Ces produits sont ensuite distribués à des associations, des épiceries solidaires et des centres communaux d’action sociale (CCAS).
L’étude "Profils des Banques alimentaires" est menée tous les deux ans auprès d’un échantillon de 1 200 personnes réparties sur le territoire. Le choix respecte l’équilibre urbain/rural et la diversité des structures (repas, colis, épiceries solidaires). Ses résultats sont assez comparables à une autre étude sur l’aide alimentaire, menée en 2021 auprès de quatre mille personnes par l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques).