On le constate de jour en jour, la Covid-19 accentue les tendances passées, notamment en matière d’accroissement des inégalités et de développement de la pauvreté. En France, le nombre de bénéficiaires du revenu de solidarité active a augmenté de 10 % en 2020 et, selon les associations caritatives, on compte un million de pauvres en plus. Le monde rural n’échappe pas à cette précarisation croissante, même si l’on dispose de peu d’indicateurs.
Il y a quelques années, un rapport de l’Igas (1) et du CGAAER (2) avait mis en évidence ce fait que dans toutes les régions, pauvres ou riches, les taux de pauvreté les plus élevés sont ceux des zones rurales. Aujourd’hui, cette pauvreté dans les campagnes, dont on ne parle guère, est silencieuse car plus diffuse, moins visible. Les personnes en précarité, qu’il s’agisse de familles monoparentales ou néorurales, de jeunes ou d’exploitants agricoles en difficulté, n’osent souvent pas engager de démarches d’assistance par peur d’être stigmatisées. Il existe une forme de pudeur dans un environnement où la valeur du travail est très forte, et la demande d’assistanat pas toujours bien vue. D’ailleurs, le recours aux prestations sociales y est moindre qu’en milieu urbain.
Pourtant, les difficultés y sont aggravées par l’éloignement et la dispersion géographique, qui ne facilitent pas la mobilité et l’accès aux soins. Le parc de logements est plus ancien, et donc plus dégradé, d’où cette précarité énergétique. Qui plus est, l’encadrement social y est bien moindre. Les solidarités traditionnelles qui existaient dans les campagnes depuis le Moyen Âge s’étiolent face à un isolement social grandissant, tandis que les associations caritatives sont mieux adaptées aux besoins des villes, et que les services sociaux ont fait les frais de la rigueur budgétaire passée.
Enfin, trop souvent dans les communes rurales, le budget des CCAS (3) est essentiellement consacré à l’organisation du repas de Noël du troisième âge !
(1) Inspection générale des affaires sociales. (2) Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux. (3) Centres communaux d’action sociale.