Terry Davidson est une victime collatérale de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine : avec la hausse des droits de douane sur le soja américain, cet agriculteur de l’Illinois pourrait voir se fermer les portes de son principal marché.

 

« Nous avons survécu depuis les années 1800 et on cultive encore, je pense qu’on continuera », déclare M. Davidson, 41 ans, qui appartient à la cinquième génération de fermiers de Harvard, bourgade située à deux heures de route au nord de Chicago (nord).

Des sanctions qui arrivent au plus mauvais moment

À Harvard, le soja recouvre des centaines d’hectares. Sur les terres de la famille Davidson, il représente la moitié de la production, avec le maïs. Les plants font déjà un mètre de hauteur et les gousses commencent à apparaître au début de juillet. La récolte est prévue au début de l’automne.

 

Comme d’autres cultivateurs de l’Illinois, premier producteur national de soja avec 43 000 agriculteurs, M. Davidson est pris entre deux feux et ignore si les taxes chinoises vont affecter les prix de ses récoltes.

 

« D’autres pays tentent de gonfler leurs stocks de soja américain. Ils prennent la place de la Chine », explique-t-il pour rester optimiste.

 

La Chine est le plus important acheteur de soja américain : elle en a commandé pour 12 milliards de dollars en 2017, soit environ 30 % de la production du pays.

 

Le soja, peu cher à produire et en forte demande à l’étranger, a permis aux agriculteurs du Midwest de garder la tête hors de l’eau, malgré les aléas économiques et climatiques.

Vendre au plus offrant

Terry Davidson n’a pas de capacité de stockage et devra vendre sa production juste après la récolte, à n’importe quel prix. Là encore, il reste optimiste : « Nos plus grands clients chinois n’ont jamais mentionné les taxes sur le soja et je ne suis pas inquiet, car ce sera terminé à la saison des récoltes. »

 

Mais d’autres professionnels – et les groupes qui les représentent – ont déjà sonné l’alerte. Les prix du soja ont chuté depuis mai, les acheteurs anticipant l’introduction des droits de douane. « À court terme, nous prenons un coup », dit Davie Stephens, agriculteur dans le Kentucky (centre-est), affirmant que beaucoup de professionnels se sentent démunis.

 

« Nous n’avons pas connu beaucoup de guerres commerciales, pour certains d’entre nous c’est la première », explique cet agriculteur de 52 ans.

Les agriculteurs déçus par Trump

La majorité des farmers vote républicain et soutient la volonté du président Donald Trump de négocier des accords commerciaux plus favorables. Notamment face à la Chine, avec qui Washington a enregistré un déficit pour les biens de 375,2 milliards de dollars en 2017. Mais certains doutent que la hausse des taxes douanières soit la bonne approche et s’inquiètent des répercussions.

 

« Plus cela dure, plus la Chine – et d’autres clients – tenteront de trouver d’autres sources » d’approvisionnement, affirme Wayne Fredericks, membre du comité directeur de l’Association du soja américain, qui encourage ses membres à faire campagne sur Twitter contre les taxes douanières imposées par Washington.

 

En exposant sur internet les visages des exploitants dont les revenus dépendent de ces exportations, l’association demande à la présidence d’annuler ces mesures le plus tôt possible.

< blockquote class = "twitter-tweet » data-lang = "fr"> < p lang = "en » dir = "ltr"> ASA urges the Administration to rescind the tariffs that took effect today & amp ; reiterates its request for the White House to continue working towards a negotiated solution to the Section 301 concerns that does not include tariffs. < a href = "https ://twitter.com/hashtag/RethinkTheTariffs?src=hash& ; ref_src = twsrc % 5Etfw"> #RethinkTheTariffs  < a href = "https ://twitter.com/hashtag/TradeNotTariffs?src=hash& ; ref_src = twsrc % 5Etfw"> #TradeNotTariffs  < a href = "https ://twitter.com/hashtag/FacesOfTariffs?src=hash& ; ref_src = twsrc % 5Etfw"> #FacesOfTariffs  < a href = "https ://t.co/O3HCtVwDZO"> pic.twitter.com/O3HCtVwDZO

&mdash ; American Soybean (@ASA_Soybeans) < a href = "https ://twitter.com/ASA_Soybeans/status/1015242132200837121?ref_src=twsrc%5Etfw"> 6 juillet 2018  

 

Pour l’administration Trump, le risque politique est élevé, alors que des élections parlementaires auront lieu en novembre. Le soja est cultivé dans les États qui ont voté pour lui en 2016, et l’Iowa avait été un État clé pour sa victoire à la présidentielle.

La filière du soja part favorite dans le combat contre l’administration

Michael Boland, spécialiste de l’industrie agroalimentaire à l’Université du Minnesota, souligne qu’avec le soja, les cultivateurs n’engrangent « déjà pas beaucoup de bénéfices. Les taxes vont les réduire à zéro, ou les faire entrer dans le négatif ».

 

À Harvard, Terry Davidson pense que la filière sortira gagnante face à l’administration : « Il y aura assez de révolte » parmi les agriculteurs « pour que ça cesse ».