Les mauvaises récoltes qui ne survenaient qu’une fois par siècle pourraient désormais avoir lieu tous les dix ans, d’ici à 2100. C’est le constat dressé par une étude de l’Université de la Colombie-Britannique, publiée le 3 septembre 2025 dans la revue Science Adviser.
Ces travaux, menés par quatre chercheurs, montrent que les rendements des récoltes deviendront de moins en moins prévisibles, en raison du dérèglement climatique avec une accentuation des mauvaises récoltes. « Pour chaque degré de réchauffement, la variabilité annuelle des rendements augmente de 7 % pour le maïs, de 19 % pour le soja et de 10 % pour le sorgho », indique le communiqué relatif à l’étude.
Les projections réalisées par les auteurs montrent qu’avec un réchauffement de deux degrés par rapport au climat actuel, les mauvaises récoltes de soja, qui se produisaient autrefois une fois tous les 100 ans, auraient désormais lieu tous les 25 ans, tous les 49 ans pour le maïs et une fois tous les 54 ans pour le sorgho.
Les auteurs ont combiné les données mondiales sur les récoltes avec des mesures de la température et de l’humidité du sol provenant de stations, de satellites et de modèles climatiques. Ils ont alors conclu que l’association de la chaleur et de la sécheresse des sols conduisait à ces pertes de rendements. Plus il fait chaud, plus le sol est sec et plus le sol est sec, plus les températures augmentent. Ce cercle vicieux est ensuite renforcé par le phénomène plus global du changement climatique.
« Si vous êtes hydraté et que vous allez courir, votre corps transpirera pour se refroidir, mais si vous êtes déshydraté, vous risquez un coup de chaleur. Les mêmes processus rendent les fermes sèches plus chaudes que les fermes humides », explique Jonathan Proctor, professeur adjoint en économie alimentaire et auteur de l’étude, cité dans le communiqué.
L’accélération des vagues de chaleur
Or, un autre rapport, publié ce jeudi 4 septembre par le réseau international World Weather Attribution, montre que les vagues de chaleur vont se multiplier avec le réchauffement climatique. Actuellement, avec un climat plus chaud de 1,3°C par rapport à l’ère préindustrielle, le risque de vague de chaleur semblable à celle qu’ont connu l’Espagne et le Portugal cet été, a été multiplié par 40.
Le coup de chaud qui s’est abattu en août sur l’Espagne a duré 16 jours. Il figure comme « le plus intense jamais enregistré », avec des températures moyennes supérieures de 4,6 degrés à celles observées au moment des précédentes vagues, d’après l’agence météorologique nationale AEMET.
Triste record météorologique pour l’été 2025 (04/09/2025)
Cet organisme espagnol a enregistré 77 vagues de chaleur dans ce pays depuis qu’il a commencé à tenir des registres en 1975, dont six dépassants de quatre degrés ou plus la moyenne. Cinq d’entre elles ont eu lieu depuis 2019.
Conséquences en cascade
Sans aller jusqu’à des phénomènes aussi extrêmes, l’étude canadienne dévoile que même des courtes périodes combinant sécheresse et températures élevées peuvent « perturber la pollinisation, raccourcir les saisons de croissances et stresser les plantes, au-delà de leur capacité de récupération ».
« Tout le monde n’est pas cultivateur, mais tout le monde a besoin de manger » donc « quand les récoltes deviendront plus instables, tout le monde le ressentira », souligne Johnatan Proctor. Les régions les plus à risque restent celles les moins équipées pour faire face à ces vagues de chaleur, comme l’Afrique subsaharienne, l’Amérique centrale et l’Asie du Sud, où beaucoup d’agriculteurs restent dépendants des pluies et vivent dans une plus grande insécurité financière.
Toutefois, ces régions ne sont pas les seules qui pourraient payer les conséquences du dérèglement climatique. « En 2012, par exemple, une sécheresse et une vague de chaleur dans la région du Middle West, aux États-Unis, ont entraîné une baisse d’un cinquième des rendements de maïs et de soja, ce qui a coûté des milliards au pays et a suscité des inquiétudes sur les marchés mondiaux. En quelques mois, les prix mondiaux des denrées alimentaires avaient bondi de près de 10 % », rappelle le communiqué.
Si l’irrigation peut être une solution pour contrer les effets de chaleur, elle reste difficile à mettre en place dans la mesure où de plus en plus de régions vont manquer d’eau à l’avenir. Les auteurs conseillent donc de renforcer la plantation de variétés de cultures résistantes à la chaleur et à la sécheresse et d’améliorer la gestion des sols. Selon eux, il faut également de meilleures prévisions météorologiques et renforcer les filets de sécurité financière, comme les assurances récolte.