« Ce n’est pas un tracteur autonome, c’est une solution de travail, expose d’entrée Nicolas Collot. Notre robot n’a pas remplacé un ouvrier ou un tracteur. Sans cette solution, le travail ne serait tout simplement pas fait » poursuit-il. Cet agriculteur, à la tête de 500 ha avec sa femme Amandine, est le premier utilisateur français du robot AgBot de chez AgXeed. L’exploitation, située à Saint-Flavy (Aube) aux portes de la champagne crayeuse, se trouve dans un bassin agricole avec une grande diversité de cultures. En plus des céréales, oléagineux et autres betteraves ou luzernes typiques du secteur, Amandine et Nicolas cultivent également des pommes de terre de consommation, du chanvre ou encore du soja…

La seconde particularité de l’exploitation, c’est que près de 70 % de sa surface est en agriculture biologique. « Nous avons logiquement des pics de travail, situés au printemps et surtout à l’automne, au moment de l’implantation et de la récolte de toutes ces cultures. Pendant ces périodes, tous mes chauffeurs sont occupés à des tâches nécessitant de l’attention, comme la récolte des tubercules ou encore le pressage du chanvre », détaille l’agriculteur. Cependant, les surfaces en agriculture biologique nécessitent du travail du sol à ces périodes et notamment du déchaumage pour les faux-semis.

Une fois sa tache programmée, ce robot de 156 ch est entièrement autonome. (© Pierre Peeters/GFA)

156 ch autonomes

« Il fallait que je trouve une solution pour réaliser ses actions plus simples et saisonnières. Si on prend du retard sur ces travaux, on le paye cash au printemps », argumente Nicolas. Pour ce dernier, trouver de la main-d’œuvre temporaire était compliqué, il s’est donc tourné vers une solution autonome. Il faut dire que Nicolas n’en est pas à ses débuts dans la robotique. « J’ai déjà deux Farmdroïd pour gérer mes betteraves », nous confie-t-il. Après plusieurs mois de discussions avec le constructeur, l’AgBot est arrivé en Champagne au début du printemps 2023.

« Je leur demandais régulièrement quand la solution serait disponible et un jour ils m’ont dit que c’était bon », se souvient Nicolas. Cette machine, la première de la sorte vendue dans l’Hexagone, repose sur deux chenilles triangulaires. Elle développe 156 ch grâce à un quatre-cylindres Deutz de 4,1 l. Sa transmission sort du lot : c’est ici une génératrice électrique directement flasquée au moteur thermique, qui assure l’énergie pour des moteurs électriques situés dans les chenilles. La vitesse d’avancement peut varier de 0 à 13,5 km/h.

Une solution polyvalente

Des relevages hydrauliques à trois points prennent place à l’avant et à l’arrière de l’appareil. Ils sont équipés de prises hydrauliques et même d’une prise de force électrique pour le relevage arrière. Les possibilités sont donc multiples. « Chez nous, il a principalement réalisé trois travaux, du déchaumage avec des dents ou des disques et du décompactage. » Dans tous les cas il s’agit d’outils portés, car le robot ne peut pas encore gérer de machine traînée.

« Dans l’ensemble, je fais travailler le robot moins vite qu’un tracteur pour un chantier équivalent. J’ai vu une différence sur l’usure des outils et des pièces de rechange surtout avec les dents. » Nicolas constate également des économies de carburant avec l’AgBot. « Pour moi, il y a plusieurs facteurs. Déjà la transmission électrique possède un meilleur rendement énergétique et elle est combinée à un train de chenilles assurant une bonne adhérence. Ensuite, la solution optimise tous ses déplacements, il y a donc peu de temps morts ou de manœuvres inutiles. »

L'AgBot est muni de relevages avant et arrière, comme un tracteur. Il est donc possible d'atteler une grande diversité de machines. (© Pierre Peeters/GFA)

Paramétrage sur ordinateur

En pratique, les parcelles à travailler sont d’abord délimitées par GPS pour réaliser des lignes virtuelles que le robot ne pourra pas franchir. Ensuite, une grande partie des paramétrages se fond derrière un ordinateur. Sur ce point, Nicolas insiste : « Nous sommes notre propre limite au système, le nombre de choses paramétrables est impressionnant. » Par exemple, le jour de notre passage, le robot effectuait un déchaumage à 9 km/h selon un angle de 3 degrés. « La régularité du travail est impressionnante, la tâche réalisée est identique à la commande. Le robot n’est pas pressé de finir la ligne et ne se lasse pas de travailler à la même vitesse pendant des heures. »

Le jour de notre passage, la machine était attelée à un Joker Horsch de 6 m, un déchaumeur à disques indépendant. (© Pierre Peeters/GFA)

Pour démarrer et commander le robot avant de le lancer en autonomie, ou simplement pour atteler un outil, une télécommande, digne d’une console de jeux vidéo, est présente. Elle affiche une portée de 200 m. « Elle me permet aussi d’ajuster les réglages aux champs. » De plus, Nicolas peut consulter à tout moment depuis son smartphone, la position de la machine et visualiser en direct l’avant et l’arrière du robot grâce à deux caméras. « Je peux également le stopper, voire arrêter directement le moteur. En revanche, je ne peux pas le redémarrer depuis le smartphone. » L’agriculteur champenois semble plus que convaincu par la solution, qui a déjà travaillé plus de 200 heures sur l’exploitation. Il réfléchit déjà à d’autres applications pour la saison 2024.

Pour ajuster les réglages ou encore atteler la machine, Nicolas dispose d'une télécommande affichant une portée de 200 m. (© Pierre Peeters/GFA)