Quel est l’impact du changement climatique sur le cycle de l’eau ?
Le cycle de l’eau est un échange constant entre la terre et l’atmosphère où, a priori, rien ne se perd. Mais les modèles du Giec nous prédisent une réduction des précipitations annuelles, avec une pluviométrie plus concentrée sur l’hiver et des baisses marquées en été. Comme toute l’eau est liée par le cycle hydrologique, cela signifie bien sûr des modifications quantitatives — et qualitatives — des eaux de surface et des eaux souterraines : baisse des débits moyens des cours d’eau, augmentation de la sécheresse des sols, baisse de la recharge des nappes, etc.
Si la difficulté reste de quantifier la disponibilité en eau en un lieu et dans un temps donné, l’idée d’une totale disponibilité de l’eau est révolue. Les épisodes de sécheresse — par exemple entre 2022 et 2023 —, avec des périodes de tension où la ressource ne permet pas de répondre à l’ensemble des usages et aux besoins du milieu naturel, sont une illustration de ce qui, potentiellement, nous attend d’ici à la fin de ce siècle.
Quel regard portez-vous sur le passé ?
En France, on a vécu trois à quatre siècles de drainage et d’assèchement des terres pour pouvoir accéder à de la surface agricole. Dans l’après-guerre, les hommes ont créé des barrages inimaginables aujourd’hui. On installait des retenues sur des embryons de cours d’eau ou des cours d’eau naissant qui allaient à l’encontre de la continuité hydraulique et écologique. On ne pensait que drainage, assainissement, retenues et barrages…
Aujourd’hui, nous devons raisonner à l’échelle du territoire, d’un bassin-versant, d’une typologie, pour trouver des solutions locales à des contraintes écologiques et géologiques locales, sans mettre en péril l’écosystème. Il faut s’inspirer de la nature et de ses astuces technologiques. On ne sait pas créer d’eau. Mais là où elle tombe, nous avons les moyens de la ralentir, d’éviter son ruissellement, de favoriser son infiltration, de la réutiliser autant que possible tout au long de son parcours jusqu’à la mer.
Quelles solutions pour être « hydro-économes » ?
Évitons de systématiser telle ou telle solution d’adaptation, comme le recours à la création de réserves et retenues… sauf s’il n’y a pas le choix ! Sur des topographies sèches où il y a un impluvium possible — et cela se calcule —, une retenue génère un volume d’eau disponible mais variable, qu’il faut apprendre à utiliser. Cela va de pair avec le choix de cultures adaptées, de préservation du sol, de techniques d’irrigation, etc. Regardez le Lot-et-Garonne avec ces petits lacs aménagés le long des cours d’eau qui se remplissent par débordement : c’est totalement acceptable.
Il faut aussi penser à redrainer l’eau issue de l’irrigation : recapter ce que le sol va relâcher pour le réintroduire dans un second bassin. On peut créer des bassins de décantation avec des surverses pour résoudre les problèmes de perte de terre arable par ruissellement… Il faut mobiliser toutes les ressources et étudier toutes les solutions, comme les eaux stockées ou non conventionnelles (eaux de process industriel, eaux usées traitées, etc.). Et aussi mutualiser son usage avec des retenues à usages multiples — et pas exclusivement pour l’irrigation ou l’hydroélectricité ou l’alimentation en eau potable. Nous avons une multiplicité de solutions techniques à mettre bout à bout pour aller vers une meilleure efficience de l’eau. À nous d’être inventif, mais au cas par cas.
(1) Ecole nationale supérieure en environnement, géoressources et ingénierie du développement durable.