« À force de dire que 50 % des producteurs partiront dans dix ans, cela s’est produit », a expliqué Christophe Perrot, chargé de mission pour l'économie de l’élevage et territoire à l’institut de l’élevage (Idele), lors de la journée intitulée Grand Angle Lait le 4 avril 2024 à Paris.

Le spécialiste a affirmé que chez les éleveurs laitiers, « le sommet du pic de départs à la retraite a probablement eu lieu en 2023 ». 30 % des éleveurs de 2018 sont partis en 2023.

Rééquilibrer la balance

Résultat, le nombre de départs va « diminuer à partir de maintenant ». Le taux de remplacement pourrait donc augmenter d’un « très bas » 40 % en 2024 à un 60 % en 2030, à condition que le maintien des installations soit au rendez-vous. Il est à noter que les élevages laitiers détiennent le taux de remplacement le plus bas du secteur agricole.

Pour Christophe Perrot, il faut voir le bon côté des choses : « Le niveau de maîtrise potentiel des départs revient après la grosse vague qui a tout emporté. » Avec le nombre d’installations qui n’a pas beaucoup varié depuis dix ans, « nous avons plus de chances de rééquilibrer la balance dans le futur ».

« Effet de la politique 30 ans après »

Pour comprendre l’effet « départs de masse » dont souffre la filière, il faut remonter aux années 1990. « À l’époque, l’État insuffle une politique de « préretraite » qui a reconfiguré le secteur laitier français », explique Christophe Perrot. De nombreux éleveurs, propriétaires de petits troupeaux (de 15 à 20 vaches) ont ainsi reçu des aides à la cessation laitière.

« Leurs références laitières étaient rachetées et attribuées à d’autres élevages de taille plus importante. » De nombreux jeunes se sont installés et ont eu accès à des aides pour s’équiper. « En tout, l’État a participé à 200 000 cessations aidées », conclut Christophe Perrot.

Ces « jeunes », aujourd’hui âgés de 55 à 60 ans, s’en vont massivement et plus tôt qu’en élevage allaitant. La pénibilité du métier joue dans la balance. Trente ans après, les choix politiques de l’État français produisent leur effet.