Du tournesol dans nos murs, nos combles, dans des panneaux de séparation phoniques de bureaux… Et pourquoi pas ? Deux études récentes montrent les atouts importants de cet oléagineux en matière d’isolation. D’abord, le projet Interreg-Poctefa, financé par l’Union européenne, et qui a rassemblé des acteurs du sud de la France, du nord de l’Espagne et d’Andorre. Les recherches se sont conclues il y a un an. Deux maisons-témoins ont été construites pour mesurer, dans le temps, la durabilité des panneaux isolants thermiques réalisés avec de la moelle de tournesol.

La durabilité des blocs réalisés à partir de moelle de tournesol est testée depuis deux ans dans des maisons-témoins à Tarbes et près de Barcelone. (© SObiotech)

Puis, sur les capacités phoniques de la plante cette fois, plusieurs chercheurs toulousains ont publié des résultats encourageants dans la revue Journal of Cleaner Production (1). Des conclusions obtenues à la suite d’une commande de la fondation artistique Luma, à Arles.

« Le meilleur des matériaux biosourcés »

Les essais ont vite conduit les acteurs (chercheurs et coopératives agricoles, notamment) à remarquer les propriétés isolantes de la « plante du soleil ». « Nous avons réussi à mettre au point un procédé simple de séparation de la tige et de la moelle », décrit Philippe Evon, ingénieur de recherche qui dirige la halle de transfert technologique du laboratoire de chimie agro-industrielle de Toulouse (LCA-INP/Inrae).

Les recherches se sont surtout concentrées sur la moelle qui est, dixit le spécialiste, « le meilleur des matériaux biosourcés qu’on a développé ». L’équipe a créé un moyen simple de réaliser des panneaux usinables de 80 cm de côté, en utilisant des liants naturels à base d’amidon de blé, de pois ou de chitosane, un dérivé de la carapace de crustacés.

Aussi efficaces, ou presque

En matière phonique, ces panneaux sont « comparables » à ceux en mélaminé (dérivé du bois) et en liège. Au chapitre de la lutte contre le chaud et le froid, « on est un tout petit peu moins bon qu’un polystyrène expansé, admet Philippe Evon. Pour avoir la même conductivité qu’un polystyrène de 5 cm, il nous faudrait un panneau de tournesol de 6 cm. »

Les liants à base de chitosane ont par ailleurs des propriétés antifongiques que n’ont pas ceux à base d’amidon. Mais ces derniers sont dix fois moins chers. « Donc il faut choisir les liants en fonction de l’utilisation », résume l’expert.

Claire Vialle et Caroline Sablayrolles, enseignantes-chercheuses au laboratoire de chimie agro-industrielle de Toulouse, mettent aussi en avant que « par rapport à l’existant, les panneaux phoniques avec de l’amidon apportent un gain environnemental sur 4 des 9 principaux impacts, dont le changement climatique. En réduisant la consommation de carburant à 30 l/ha, on passerait à un gain sur 6 critères. » L’idée est aussi de laisser de la matière organique dans les champs et de récolter 55 % de la tige.

(1) Ces chercheurs sont issus des laboratoires de chimie agro-industrielle (LCA — Toulouse INP/INRAE) et Toulouse biotechnology institute (INSA/INRAE/CNRS) du centre INRAE Occitanie-Toulouse.