Le colza est soumis en début de cycle à divers bioagresseurs (lire le tableau ci-dessous). Ceci est d’autant plus vrai si la culture n’est pas implantée en conditions optimales (lire en p. 44). Terres Inovia le martèle, l’implantation est l’étape clé pour créer des colzas vigoureux, capables de supporter les attaques de ravageurs. La phase de croissance lente, qui va de la levée jusqu’au stade 4-5 feuilles, est critique. C’est notamment une période où les limaces peuvent occasionner des dégâts. Toutefois, les conditions sèches ne leur sont pas favorables, comme on a pu le constater ces dernières années.
« Depuis deux ans, les mouches du chou ont probablement profité d’étés chauds et secs pour être plus présentes, même en dehors des zones habituelles (Centre, Nord - Nord-Est), indique Laurent Ruck, responsable national de l’évaluation des insecticides et du biocontrôle des ravageurs chez Terres Inovia. En avançant les dates de semis, on s’expose davantage à ce ravageur. Mais si la levée est rapide et que la culture pousse vite, le pivot est plus gros et peut mieux résister aux larves. » Actuellement, il n’y a pas de solutions.
Les petites altises peuvent aussi être problématiques à cette période. Au-delà de huit pieds sur dix avec des morsures et un quart de la surface foliaire détruite, elles seront gérées avec des pyréthrinoïdes, voire du Boravi WG (1 kg/ha). Le spécialiste ajoute qu’il ne faut pas retourner les repousses des anciens champs de colza proches des parcelles pour éviter que ces coléoptères se déplacent et les colonisent en pleine levée.
Sur pucerons verts, il existe désormais des variétés présentant des résistances partielles pour lutter contre l’impact du TuYV (virus de la jaunisse du navet) sur colza. « Résistant aux pyréthrinoïdes et au pyrimicarbe sur les variétés “non résistantes à la jaunisse”, le puceron peut seulement être supprimé avec Teppeki depuis le retrait des néonicotinoïdes, il y a deux ans », ajoute Laurent Ruck.
Risque agronomique
Mais les deux ravageurs que tous les producteurs redoutent le plus restent la grosse altise (larves et adultes) et le charançon du bourgeon terminal. Car en attendant d’avoir des solutions génétiques (lire l’encadré ci-dessus) pour en venir à bout, la pression s’est intensifiée ces dernières années. D’ailleurs, ils présentent tous deux des résistances aux pyréthrinoïdes. Le premier est présent sur l’ensemble de la zone de production du colza et le second dans le Centre, le Nord-Est et une partie du Sud-Ouest.
Mais avant d’intervenir avec un insecticide, il faudra évaluer le risque agronomique (consulter la règle de décision sur www.terresinovia.fr). En effet, la nuisibilité des charançons du bourgeon terminal, comme des larves de grosses altises, est dépendante de la présence du ravageur mais aussi des capacités du colza à pousser régulièrement à l’automne et à reprendre au plus vite au printemps. Ce danger sera couplé à l’évaluation de la pression d’insectes pour estimer la menace globale.
Pour le charançon du bourgeon terminal, Terres Inovia précise que dans les situations où les risques agronomique et historique de présence de l’insecte sont faibles (nuisibilité rare), une impasse peut s’envisager. Dans les autres cas, un traitement est nécessaire si des captures sont relevées dans les cuvettes jaunes ou lors des observations dans le cadre des Bulletins de santé du végétal. Ces derniers indiquent la dynamique des vols et parfois la maturité des femelles. Pour des vols de fin septembre, l’insecticide sera appliqué quinze jours après les premières captures d’adultes. S’ils interviennent courant octobre, il faudra passer huit à dix jours plus tard.
Côté grosses altises adultes, si le colza est semé tôt et atteint 3-4 feuilles avant leur arrivée, il n’y aura pas besoin d’intervenir. Sinon, un traitement sera nécessaire. « Pour la larve de grosse altise, en l’absence de risque agronomique, il est préconisé d’intervenir au seuil indicatif de cinq larves par pied (en réalisant des tests Berlèse), précise Terres Inovia. Et en cas de risque agronomique identifié, à partir du seuil indicatif de deux à trois larves par pied ou de 70 % de plantes porteuses de larves. »
Peu d’alternatives
Quoi qu’il en soit, le recours aux insecticides devra tenir compte du statut de résistance connu ou suspecté (lire les cartes en pp. 40-41). « Un mauvais choix peut entraîner un échec immédiat et exercer une pression de sélection inutile », juge l’institut. Le retrait régulier de molécules n’est pas pour simplifier l’équation. Ainsi, le chlorpyriphos-méthyl n’est plus utilisable depuis le 16 avril dernier. Il ne reste désormais pour lutter contre ces deux coléoptères d’automne que les pyréthrinoïdes et Boravi WG. Dans les zones où les pyréthrinoïdes ne fonctionnent plus du tout, il est recommandé, pour ralentir la progression des résistances, d’employer Boravi WG à 1,5 kg/ha (1 kg sur adultes de grosses altises). Il faudra alors faire avec la réglementation, qui ne permet pas plus de deux applications par campagne.