Les producteurs de foin de Crau tirent la sonnette d’alarme. Depuis l’an passé, le cours de ce fourrage, qui bénéficie d’une appellation d’origine protégée, a plongé de 30 % à 50 % suivant les qualités. « Même avec ces baisses de prix, nous avons du mal à écouler notre stock, déplore Olivier Allard, qui exploite 45 hectares sur la commune d’Arles (Bouches-du-Rhône). Le printemps humide de l’an passé a favorisé la production de fourrage partout en France. Nous subissons également les conséquences de la diminution du cheptel ovin et bovin, amplifiée par les épizooties. Or, avec la filière équine ce sont nos principaux débouchés. » Et, faute de bétail, des éleveurs se mettent à cultiver du foin sur leurs prairies.
Invendus
Dans son hangar, il lui reste des invendus de l’an passé. Les perspectives ne sont guère encourageantes pour la récolte de cette année. « Actuellement, le fourrage part à 150 € la tonne, indique Didier Tronc, directeur du Comité du foin de Crau. C’est très insuffisant pour couvrir les coûts de production. »
Lesquels sont alourdis par un mode d’irrigation unique, par submersion, hérité de traditions séculaires. Les prairies sont inondées grâce à un réseau de canaux et de martelières, qui permet d’acheminer l’eau par gravité jusqu’aux parcelles. Une méthode particulièrement chronophage : Olivier Allard y consacre huit jours sur dix, de mars à septembre, pour irriguer ses quinze parcelles. Selon le Comité du foin de Crau, les seules charges d’arrosage s’élèvent entre 500 et 600 €/ha.
À ce jour, 30 % de la récolte de 2024 reste encore stockée. « Si la situation perdure, nous allons entrer dans une crise profonde, prévient Didier Tronc. Deux producteurs ont déjà cessé leur activité, et deux autres s’apprêtent à le faire. » Les professionnels ont donc alerté les pouvoirs publics : la culture du foin de Crau ne se limite pas à une production agricole. Son système d’irrigation alimente 70 % de la nappe phréatique locale, fournissant de l’eau potable à 300 000 habitants et de l’eau d’irrigation pour le maraîchage. Un véritable enjeu environnemental et territorial.