Malgré le rejet par l’Assemblée nationale du volet relatif aux recettes du projet de loi de finances pour 2026 (PLF 2026), dans la nuit du vendredi 20 au samedi 22 novembre 2025, Sébastien Lecornu refuse la fatalité du blocage. « Il y a toujours une majorité à l’Assemblée nationale pour permettre de voter le budget pour l’année prochaine », a-t-il déclaré lundi 24 novembre 2025, depuis le perron de l’hôtel de Matignon, dans une allocution télévisée visant à « rendre compte à la Nation de là où nous en sommes ».

Le texte budgétaire est en navette parlementaire entre le Sénat et l’Assemblée nationale, c’est-à-dire à mi-chemin des discussions entre les deux chambres. Pour parvenir à son adoption sans recourir au 49-3 (1), le chef du gouvernement met la pression sur les groupes politiques qui composent le Parlement.

L’agriculture, priorité stratégique nationale

Le Premier ministre souhaite obtenir un « large consensus à l’Assemblée nationale » sur deux dossiers majeurs : l’accord commercial avec le Mercosur et la future Pac pour laquelle « nous devons poser les premiers jalons dans les semaines qui vont venir ». Dans son allocution, Sébastien Lecornu ne détaille pas le contenu technique de ces deux dossiers, mais il établit le lien entre les choix agricoles et l’équilibre budgétaire. En inscrivant l’agriculture parmi ses cinq priorités stratégiques — au même niveau que la défense, l’énergie, la réforme de l’État et le déficit —, le Premier ministre souligne que ces arbitrages ne peuvent plus attendre.

Face au blocage parlementaire, le chef du gouvernement propose une méthode dite « en entonnoir ». Il va recevoir l’ensemble des formations politiques représentées à l’Assemblée nationale et au Sénat, les chefs des groupes qui soutiennent l’action du gouvernement, les membres du gouvernement, ainsi que les partenaires sociaux et les représentants du patronat. L’objectif : « recréer un cadre de compromis en amont de la reprise du budget ». Le Premier ministre envisage d’organiser des votes thématiques spécifiques sur ces sujets, avant la reprise des discussions budgétaires.

Sébastien Lecornu conclut son allocution en assurant : « On va y arriver. » Le Premier ministre maintient cette conviction, mais pose trois conditions : que le Parlement redevienne un lieu de travail, que les partis rompent avec ceux qui misent sur la crise, et que la Nation soit tenue informée avec transparence.

(1) L’article 49 alinéa 3 de la Constitution permet au Premier ministre d’engager la responsabilité du Gouvernement sur un texte : celui-ci est alors considéré comme adopté sans vote, sauf si une motion de censure est déposée dans les 24 heures. Si cette dernière est adoptée, le gouvernement tombe et le texte est rejeté. En octobre 2025, Sébastien Lecornu a annoncé qu’il renonçait à recourir au 49-3 pour faire adopter le PLF 2026. Il souhaitait ainsi privilégier la recherche d’une majorité parlementaire classique par le vote — une démarche plus risquée, mais qui évite de provoquer une crise institutionnelle.