Depuis cinquante ans, Loïc de Saleneuve est une figure du marché de Saint-Tropez (Var). Les plus informés savent qu’il défend l’élevage caprin, et a assumé pendant dix-huit ans le rôle de vice-président de la chambre d’agriculture du Var. La plupart apprécient sa bonhomie, son esprit, les fromages confectionnés avec le lait de ses chèvres et les charcuteries de sa ferme de Collobrières.

Il vend également aux gourmets de passage, aux Tropéziens et aux chefs de la presqu’île des œufs, de l’huile d’olive, des fruits et légumes du jardin. Le slogan qu’il affiche volontiers au-dessus de son étal : « Paysan je suis. Je vends ce que je produis, et j’en suis responsable », résume ses convictions. Aujourd’hui retraité, il s’occupe toujours avec son fils Geoffroy d’une centaine de chèvres, du maraîchage et de ses oliviers.

Le pouvoir des mots

Cet homme n’est pourtant pas né dans le Sud. Il grandit à Diou dans l’Allier, dans les années 1950. Sa grand-mère l’emmène sur des fermes acheter de quoi bien se nourrir. Sa tante Jeanne, institutrice, lui ouvre des horizons grâce à la littérature, la musique et la poésie. « J’ai découvert enfant le pouvoir des mots justes, pour apaiser les maux. » Il écrit pour lui-même. Devenu un adolescent large d’épaules, il pratique le judo et le rugby qui lui enseignent le respect de la pratique, des autres et de lui-même.

À une carrière de rugbyman débutée à Clermont-Ferrand, il préfère des études en agriculture, pour en faire son métier au milieu des années 1970. Par chance, son cousin François le sollicite pour entretenir en sylvopastoralisme des parcelles forestières à Collobrières. « J’ai pris mes livres, ma 2 CV et je suis descendu dans le Var. » Ainsi naît sa ferme : La Bastide de la Cabrière qu’il aménage progressivement avec son épouse Andrée-Cécile. Le couple aime accueillir à sa table d’hôtes.

Lié d’amitié avec Arnaud Donckele (trois étoiles au Michelin et petit-fils d’agriculteurs), Loïc l’entend insister : « Il faut absolument que tu publies tes poèmes ! » L’idée fait son chemin d’un recueil illustré par des photos. « Poèmes et délires d’un paysan chevrier amoureux » sont édités à compte d’auteur, et dédiés à son petit-fils, Jules. « Si vous êtes dans la bienveillance, vous avancerez… », est l’une des maximes de cet amoureux de la vie.

Alexie Valois