« Le monde agricole, j’y suis née, j’y ai grandi, j’en suis partie et j’y suis revenue, déclare Delphine Laurent, cinquante ans. Je suis double active, comme mes parents, ce qui donne du recul sur ce milieu. » Dans son livre « Naisseur », sorti en février dernier, l’éleveuse de bovins allaitants de Laissac-Sévérac-l’Église (Aveyron) souhaitait « montrer le système, pas le dénoncer. Je ne voulais pas prendre parti mais décrire ce monde tel que je le connais. Il est hyperattachant mais a aussi des travers. »

L’amour des animaux, le rythme des saisons, la solidarité, la transmission mais également parfois la solitude, les dettes, voire le suicide : l'autrice évoque tous ces sujets. Attentive à ce qui l’entoure, elle déclare, toujours prolixe : « Dans mon roman, tout est vrai mais rien n’est vrai, c’est une fiction. J’ai essayé de faire comme un reportage, mais ces personnages n’existent pas. Je crois que je le raconte bien car c’est le milieu dont je suis pétrie. »

Des chansons sélectionnées par Nougaro

De fait, la Marie-Loup de l’œuvre ressemble à Delphine Laurent : les deux ont repris l’exploitation familiale, certes pas dans les mêmes conditions. Comme son personnage, « mon épouse n’est pas du genre à pleurer sur son sort », signale son mari Mikael. C’est même plutôt une obstinée : « Elle se levait tous les jours à 6 heures du matin pour écrire, même pendant les vacances ! », s’exclame-t-il. Il faut dire que les journées de cette femme infatigable sont chargées, entre son emploi dans l’Administration, l’élevage, ses deux enfants, la vie de famille…

Cette titulaire d’un bac + 5 de lettres modernes a pris sa plume tout « naturellement ». « J’ai toujours écrit », sourit-elle. Il y a plus de 20 ans, elle a même composé des textes de chansons, repérées par Claude Nougaro et chantées par JeHaN… De « Naisseur », il ressort des pages aux mots justes, emplies d’images marquantes. « J’avais dans l’idée d’être éditée, je ne voulais pas m’auto-éditer, déclare-t-elle avec une certaine assurance. On a suffisamment d’estime de soi pour penser que c’est bien. » À raison : elle a réusi à convaincre Albin Michel, l’une des plus grandes maisons d’édition française !