Sous sa fine silhouette, Patricia Tronche, cinquante et un ans, cache une sacrée force de caractère. En 1993, l’agricultrice reprend la ferme de sa belle-mère à Lanteuil, en Corrèze, mêlant veau de lait, broutards et maraîchage. Trois ans plus tard, elle se lance en parallèle dans l’exploitation d’une châtaigneraie datant de la Révolution française. Mais, il y a une dizaine d’années, une crise d’épilepsie invalidante avec suspicion d’AVC (1) laisse Patricia paralysée du côté gauche. Elle se retrouve en fauteuil roulant, avec des problèmes d’élocution et ne sachant même plus lire. Son mari Jean-Paul et ses fils prennent le relais à la ferme. Suivent trois années de rééducation.

Aider les handicapés

C’est là que l’agricultrice découvre la vannerie en rotin, grâce à un ergothérapeute. « De retour chez moi, j’avais besoin de m’occuper, de me sentir utile », raconte-t-elle. Patricia demande donc à son père de lui apprendre à confectionner le fameux cabas de Beynat, dont la tradition date de plusieurs siècles (lire l’encadré). « Je fatiguais vite, mais cela fonctionnait comme une gymnastique du cerveau », confie-t-elle.

Après avoir recouvré l’usage de ses jambes, Patricia monte des ateliers de vannerie. Dans sa ferme, où elle a aménagé un écomusée Terroir et Tradition, elle accueille quatre à six vacanciers durant deux ou trois heures. Dotés chacun d’un moule en bois et d’un crochet, adultes ou enfants fabriquent des petits cabas en paille tressée. « J’aime transmettre ce savoir régional », affirme-t-elle. L’agricultrice reçoit également des personnes handicapées, un monde qu’elle a découvert lors de sa rééducation. « Je les invite à réaliser quelque chose de simple, mais qui oblige à travailler mémorisation et motricité. »

Avec les autistes, elle préfère la vannerie en rotin, qui n’exige pas d’outil dangereux. Trois à quatre jeunes, entre six et quinze ans, viennent ainsi s’exercer une heure et demie par semaine. Parfois, pendant les vacances scolaires, des handicapés d’autres régions s’inscrivent aux ateliers.

« Il faut beaucoup de patience et s’adapter à chaque comportement, précise Patricia. Souvent, les personnes en fauteuil sont agressives. J’essaie de leur redonner le moral et l’envie de se battre. Je leur dis qu’il ne faut jamais rien lâcher même si les médecins vous disent que vous êtes condamné… La meilleure preuve, c’est que je suis toujours là ! »

Raphaëlle Saint-Pierre

(1) Accident vasculaire cérébral.