C’est Loïc Prud’Homme, député de la Gironde (La France insoumise), qui a posé la question à Brune Poirson. « Qu’allez-vous faire, qu’allez-vous dire quand Bayer va arriver dans quelques années à l’aube de l’interdiction de cette substance active, avec une nouvelle molécule qui aura été homologuée par l’Efsa ? Est-ce que ce sera pour vous une alternative au glyphosate ? »
« Il ne faut pas qu’une substance en chasse une autre »
La secrétaire d’État a saisi la balle au bond : « Nous, notre priorité c’est de favoriser les alternatives non chimiques. Il ne faut pas qu’une substance en chasse une autre. […]. Il ne faut pas être naïf, on aura encore besoin un petit peu à terme de certains produits phytosanitaires, mais il faut drastiquement en réduire la quantité utilisée. »
« C’est tout l’objectif très ambitieux du plan Ecophyto, avec une réduction de moitié d’ici à 2025, une réduction de 25 % d’ici à 2020, poursuit-elle. Donc des objectifs très ambitieux mais qui visent essentiellement à accélérer les changements de pratiques, les changements de comportements, les changements d’habitudes en matière de pratiques agricoles. »
Brune Poirson a rappelé que l’Anses réévalue actuellement les autorisations de mise sur le marché de 69 produits contenant du glyphosate avec l’appui de l’Inra. « Ce processus va s’étaler jusque dans le courant de l’année 2020. Il sera présenté dans les prochaines semaines aux premières filières l’analyse des alternatives existantes notamment sur le plan financier. Ça donnera ensuite lieu à l’annonce par l’Anses de l’interdiction, le cas échéant, décalée dans le temps de certains usages du glyphosate. »
Les filières au travail
Brune Poirson a assuré que cette sortie du glyphosate était réalisée en « lien étroit avec les professionnels. Les filières seront réunies d’ici à la fin d’avril pour faire le point sur l’avancée de leurs plans de filière en matière de réduction des pesticides et du glyphosate en particulier », a-t-elle précisé avant d’insister sur le besoin d’une transparence renforcée sur le suivi des ventes de phytos.
« Il faut savoir qui utilise le glyphosate et comment, a-t-elle lancé aux députés. Attention, pas à un niveau de granularité qui soit suffisamment précis pour faire du “name and shame” personnel sur chacun des agriculteurs. Ce n’est absolument pas le but. Mais simplement de partager des données. La donnée est essentielle. »
Transparence sur les achats et ventes de phytos
Brune Poirson a révélé qu’hier, lors du comité Ecophyto, François de Rugy a annoncé « qu’il ouvrirait le 1er juillet prochain la base de données d’achat et de vente de pesticides dont le glyphosate, à l’échelle de la commune. Nous nous entourons de toutes les précautions en matière de protection de l’anonymat des acheteurs, c’est-à-dire des agriculteurs. »
La secrétaire d’État a assuré que « les données pour les communes comptant moins de cinq agriculteurs seront occultées. Aujourd’hui, ces données ne sont disponibles qu’à l’échelle du département. Donc c’est une avancée qui est majeure. On passe de l’échelle départementale à l’échelle communale. » La FNSEA, lors de son congrès s’était inquiétée de cette ouverture.
Sur la question des moyens financiers accordés aux agriculteurs pour cette sortie du glyphosate, c’est Matthieu Orphelin, député du Maine-et-Loire (non inscrit), qui a pris la parole. « Est-ce que les moyens d’accompagnements financiers des agriculteurs sont suffisants ? Je pense que non, qu’on aurait tout intérêt à mettre 100, 200, 500 millions d’euros en plus. »
Pour Brune Poirson, « les moyens d’accompagnement sont suffisants. On a pleinement conscience de l’effort que nous demandons aux agriculteurs. » La secrétaire d’État a mis en avant comme moyen d’accompagnement « la séparation de la vente et du conseil », et « des négociations pied à pied sur la Pac pour qu’elle soit plus encore destinée à aider et soutenir les comportements vertueux. »