Produire plus de méthane en valorisant le dioxyde de carbone (CO2) du biogaz issu de la méthanisation, telle est la promesse de la méthanation. Pour ce faire, le CO2 réagit avec de l’hydrogène (H2) pour former du méthane et de l’eau. Deux entreprises françaises comptent parmi les pionniers de cette technologie dite de Power-to-gas, c’est-à-dire de conversion d’énergie électrique en gaz. La méthanation pourrait à terme trouver sa place sur des sites de méthanisation agricole. Deux unités de ce type accueillent les premiers démonstrateurs.
Un prototype en fonction
Le premier est basé dans l’Oise. La start-up Energo, fondée en 2018, y a installé en 2021 son premier démonstrateur en conditions réelles. Le réacteur dans lequel 2 Nm3/h de méthane sont synthétisés à partir de H2 et de CO2 est grand comme une boîte à chaussures. L’ensemble du prototype tient dans un petit container (voir photo). « En plus du réacteur, on trouve un électrolyseur pour produire de l’hydrogène à partir d’électricité, explique Pauline Ferté, responsable procédés chez Energo. Le dispositif comprend aussi un système de valorisation de chaleur et un condenseur pour récupérer les calories et l’eau, tous les deux issus de la méthanation. » La chaleur pourrait notamment être utilisée pour chauffer le digesteur ou des bâtiments.
La valorisation ne représente actuellement qu’une petite partie des 120 Nm3/h de CO2 mais la preuve de fonctionnement est là. Des discussions sont en cours avec plusieurs acteurs pour développer de plus grosses unités sur cette nouvelle technologie de plasma catalyse adaptée aux installations agricoles.
Première injection en 2022
Le méthane du prototype d’Energo n’est pour l’instant pas valorisé. Le projet Méthycentre, porté par Storengy, est en construction. Il sera de taille plus importante et injectera du méthane de synthèse dans le réseau dès l’été 2022. Le site est situé à proximité d’un élevage porcin d’Indre-et-Loire. Une unité de méthanisation sort de terre et verra à son côté une unité de production d’hydrogène, une station-service H2 ainsi qu’un méthaneur. « L’objectif c’est de produire 50 Nm3/h de méthane, dont treize issus de la méthanation, ajoute Diane Defrenne, cheffe de projet sur Méthycentre. Pour avoir le droit d’injecter du méthane de synthèse, nous avons obtenu une dérogation de la CRE (1). Mais la vocation première du site est de développer et optimiser chaque brique technologique avec un consortium d’entreprises expertes. Aujourd’hui, la production de méthane de synthèse est trop chère pour être rentable, mais ce premier site d’envergure va servir à identifier les leviers de compétitivité à chaque étape du process. »
Le projet est suivi de près, comme celui d’Energo. En effet, le Power-to-gas est intéressant dans un contexte de transition énergétique, car c’est un moyen de compenser l’intermittence de l’éolien et du photovoltaïque en valorisant les surplus d’électricité, lorsque la production est supérieure à la consommation.
Gildas Baron
(1) Commission de régulation de l’énergie.