Depuis le mois de novembre 2009, le maïs grain humide inerté est intégré dans l’alimentation des soixante-dix montbéliardes du Gaec La Sauvegarde, à Viry, près de Genève, en Haute-Savoie. Il a remplacé le concentré de production (une VL 24) et les céréales distribués pour compenser le manque d’énergie de la ration, en particulier l’été. Stocké dans un silo vertical souple, il est apporté l’hiver à raison de 2 kg par jour, en complément du maïs épi et, l’été, à raison de 8 kg (lire ci-contre).

Originaire des pays scandinaves, l’inertage est un procédé de conservation naturel, anaérobie (en l’absence d’air) et sans fermentation. « Le produit est stable au plan physico-chimique, nutritif et bactériologique, souligne Damien Perreard, associé avec son frère Xavier sur l’exploitation. On ne perd ni eau, ni amidon. » Des analyses du produit, ainsi que le suivi du lait sont réalisés en collaboration avec la filière IGP (1) Tomme, Raclette et Emmental de Savoie, pour laquelle les deux frères livrent les 650 000 litres de lait produits annuellement. Elles ont montré l’innocuité du maïs inerté et l’absence de risque vis-à-vis de la listeria et des spores butyriques.

Être rigoureux à la récolte

« C’est un produit très sain, aussi bien en année sèche qu’en année humide, à condition de faire preuve de rigueur lors de la récolte, du remplissage du silo et de la reprise du grain. »

À la moisson, les agriculteurs visent « une qualité irréprochable, sans rafle ni canne de maïs », qui risqueraient de bloquer par la suite le bon écoulement du grain dans le silo. « Notre entrepreneur connaît nos exigences », précise Damien. Le grain est récolté entier autour de 30 % d’humidité. « On peut monter à 35 %, mais au-delà, on risque une prise en masse dans le silo, poursuit-il. Pour réduire les risques à la récolte, nous avons opté pour des variétés plus précoces (indice 280-300, au lieu de 320) et nous essayons de semer au plus tôt. Le silo doit être rempli avec du matériel propre et entretenu soigneusement. Il est entièrement vidé tous les trois ans. En cas de déchirure d’un œillet ou de la bâche, des rustines doivent être posées rapidement. »

Distribué toute l’année

Le maïs inerté assure l’autonomie énergétique de la ration, avec un impact positif sur le coût de celle-ci. « Auparavant, nous achetions 63 tonnes d’aliments l’été pour compenser l’interdiction, dans l’IGP, d’utiliser l’épi de maïs entre le 15 mai et le 15 octobre (1). Aujourd’hui, nous distribuons du maïs inerté toute l’année. Dans les rations à base de foin, les vaches apprécient l’humidité et l’appétence du produit. À chaque transition alimentaire, la mise à l’herbe en particulier, nous ne perdons plus de lait. Sur des prairies récentes avec une bonne proportion de trèfles, la production des vaches augmente. »

Les soixante-dix montbéliardes produisent en moyenne 8 600 kg de lait, avec un TB de 39 g/kg et un TP de 34 g/kg. Aucune évolution des taux de matière utile du lait n’a été enregistrée à la suite de l’introduction du maïs grain humide. En revanche, les éleveurs ont noté une meilleure persistance de la lactation, ainsi que des vaches un peu plus en état. La progression de la production de 1 000 kg de lait par vache et par an, enregistrée entre 2009 et 2012, ne peut pas être reliée exclusivement au maïs inerté. Elle s’explique aussi par la mise en route d’un robot et l’apport d’une complémentation individuelle.

Pour tous les animaux

Ce maïs grain humide est désormais distribué à l’ensemble du troupeau : les vaches, mais aussi les veaux (dès quinze jours-trois semaines d’âge) et les génisses. Par exemple, après sevrage, les jeunes femelles reçoivent du maïs inerté, des granulés à 42 % de protéines et de la paille à volonté.

Ce produit présente un avantage supplémentaire. « Outre sa traçabilité totale, avancent les éleveurs, il contribue à la réduction des coûts de transport de l’alimentation et à l’amélioration du bilan carbone de l’exploitation. Le trajet le plus long, du champ de maïs au silo, fait trois kilomètres ! »

(1) L’indication géographique protégée.

(2) L’ensilage de maïs est interdit, et le maïs épi toléré du 15 octobre au 15 mai dans le cahier des charges de l’IGP.