«Quand je suis venu pour la première fois en Ukraine, en 2003, je suis tombé amoureux des tchernozioms, se souvient Régis Fournier, directeur général de Mas Seeds (ex-Maïsadour Semences).Jusqu’en 2007, nous exportions, dans ce pays, le surplus de semences produites en France. Il nous servait de variable d’ajustement. Mais nous avons vite mesuré l’intérêt d’y investir. Le potentiel est énorme, il y a de bonnes terres et des surfaces. »
En 2007, Mas Seeds ouvre un bureau à Dnipro, au sud, avec deux salariés. Face au potentiel, la coopérative décide d’investir 40 millions d’euros pour construire la première usine de production de semences près de Dnipro, en zone irrigable. Elle verra le jour en 2010. « Elle a été dimensionnée pour alimenter les marchés ukrainien et russe, explique Régis Fournier. Nous avions prévu de construire quatre séchoirs à maïs, malheureusement du fait de la guerre entre les deux pays, l’Ukraine n’a plus le droit de vendre sa production en Russie. » Seuls deux ont donc vu le jour pour l’instant (en 2010 et 2013). « Nous ne remplissons que 60 % de la capacité de ces deux séchoirs, précise le DG. Le doublement récent de la production de semences de maïs en France, tous semenciers confondus, et la position de premier exportateur au monde du pays, explique également que nous n’exploitons pas encore en totalité le potentiel de l’usine. En Ukraine, nous vendons 50 % de semences françaises et 50 % de semences ukrainiennes. »
Mais plusieurs gros avantages viennent asseoir la décision de posséder une usine sur place : pas de problème de douanes, baisse des coûts logistiques, répartition du risque climatique avec une usine en France et en Ukraine, crédibilité augmentée pour les acheteurs locaux, qui peuvent visiter l’usine, et un marché qui s’agrandit.
En 2018, Mas Seeds Ukraine présente un chiffre d’affaires de 20 millions d’euros, en progression moyenne de 12 % par an. Un nouveau centre de recherche et développement, construit près du nouveau siège social, proche de Kiev, est venu renforcer cet ancrage en Ukraine. Le but est de créer « des variétés associant des génétiques, sélectionnées à l’Ouest et à fort potentiel de rendement, à des génétiques adaptées au stress hydrique et au climat continental de l’Est », précise Régis Fournier. D’ici à cinq ou six ans, une nouvelle génétique, créée sur les tchernozioms, pourrait ainsi être utilisée en France.
à l’horizon 2026, Mas Seeds compte ensemencer un million d’hectares de maïs et de tournesol en Ukraine, et autant en Russie, soit le double qu’à présent. Cela représentera 10 % du marché. Pour ce faire, Mas Seeds Ukraine s’appuie sur son réseau d’agriculteurs multiplicateurs, qu’elle a créé et accompagne notamment sur l’irrigation, « indispensable à l’obtention de semences élites ». Ils sont actuellementune trentaine d’exploitants, comme Vadim, sur 3 000 ha en contrat de multiplication de semences (2/3 en maïs et 1/3 en tournesol). En 2017-2018, 400 000 doses de semences seront produites, pour une capacité de production de l’usine de 1 million de doses de semences.