«Cela fait tout juste un an. Comme à son habitude, ma chienne Scherzo m’accompagnait pour la traite des 50 vaches du troupeau. Cette belle chienne de race berger belge groenendael, toute noire avec le bout des pattes blanches, des traits fins, était docile et fidèle. Mais ce 16 mai 2015 n’était pas une journée ordinaire, car ce jour signait l’arrêt de l’activité laitière de ma ferme. J’ai cédé mon exploitation à un jeune agriculteur qui s’est associé avec son frère et son oncle sur la commune voisine. Après la traite, une bétaillère est venue charger les animaux pour les emmener sur leur ferme située à 3 km de chez moi. Allongée dans la cour, ma chienne observait les opérations et les allées et venues. Au quatrième tour, elle est partie se placer sous une roue de la remorque. Le chauffeur et moi n’avons rien vu. Âgée de 12 ans, elle est morte sur le coup.

Une vraie complicité

A-t-elle réalisé ce geste volontairement ? Je pense qu’elle a senti les choses et que c’était sa façon de montrer qu’elle ne voulait pas laisser partir le troupeau. Ça a été un coup dur car elle était pour moi un véritable compagnon. Aux heures de traite, elle allait chercher les vaches au champ. Jamais besoin de montre. Elle les poussait dans le parc d’attente. Pas besoin de chien électrique. Nous avions une vraie complicité. Il suffisait que je lève les bras pour qu’elle s’exécute sans que je ne lui donne d’ordre. Elle me comprenait. Un jour, alors que les génisses d’un voisin s’étaient sauvées dans un champ où se trouvaient mes vaches, elle a trié les animaux sans problème. Elle connaissait mon troupeau. Pour les travaux des champs, elle m’accompagnait toujours dans la cabine du tracteur. Sur l’exploitation, elle me suivait partout. C’est simple, quand les gens la voyaient, ils savaient que je n’étais pas bien loin.

Laisser partir mon troupeau, c’était déjà dur ! Je m’étais dit qu’il me resterait ma chienne. J’y étais très attaché. Elle était née sur l’exploitation.

Au départ, je ne pensais pas reprendre un chien. J’ai tenu quinze jours mais la présence d’un animal au quotidien me manquait trop. J’ai acheté un chien, Jack, huit mois, un beauceron. Il m’accompagne quand je pratique la course à pied. Mais il ne remplacera jamais ma fidèle Scherzo. »