« Ce samedi 23 avril, cinquante-cinq personnes sont venues me prêter main-forte pour déplacer un hangar agricole sur plus de 200 mètres et le mettre derrière la stabulation de mes vaches allaitantes. Nous l’avons transporté à bras d’hommes. Nous étions répartis en binôme, avec quelqu’un de chaque côté pour soulever une barre en fer. Casquette vissée sur la tête, j’étais à l’avant des porteurs pour donner la mesure.
Ce bâtiment appartenait au cédant. Il était situé près de sa maison et lui gâchait la vue sur la vallée. De mon côté, il m’intéressait pour stocker du matériel. Construire du neuf est devenu inabordable. Il n’était pas question non plus de démonter puis remonter ce hangar vieux de trente-six ans, long de 25 mètres et large de 7,5 mètres. Un menuisier du coin m’a suggéré de le déplacer à force humaine.
Après prises des mesures et calculs, nous avons décidé de le couper en deux, pour limiter la charge à 2 tonnes sur chaque partie. L’artisan nous a conseillé de mettre un cadre en bois tout autour, pour renforcer la base avec des bastaings et des tiges en fer. Restait à trouver les bras ! Comme l’idée a été lancée il y a près d’un an, le bouche-à-oreille a fonctionné. Famille, amis, agriculteurs de la commune et des alentours, habitants du hameau, amis d’amis… ont répondu à l’appel. L’équipe de foot de Goudelin, dans laquelle je joue, s’est fortement mobilisée.
En une heure, les deux morceaux de l’ouvrage étaient déplacés de 200 mètres. Et après l’effort, le réconfort. Pour remercier tout le monde, j’avais prévu un casse-croûte et une boisson. Je ne m’attendais pas à bénéficier de l’aide d’autant de bénévoles. Heureusement d’ailleurs qu’ils étaient si nombreux, car cette construction pesait son poids. J’ai été étonné de voir des gens que je ne connaissais même pas. Certains venaient d’assez loin.
On entend souvent dire que le milieu agricole est de plus en plus individualiste, mais voilà un bel exemple de solidarité. Quand quelqu’un a besoin d’aide, les gens répondent présent. Ils étaient contents d’avoir participé à cette opération très inhabituelle et, surtout, d’avoir réussi ce challenge sans encombre. Jusqu’au dernier moment, nous ne savions pas si tout allait bien se passer. Après une première vie chez le cédant, cette grange va en connaître une seconde ici. On a fait du neuf avec du vieux. »