Souvent, la transmission est vue comme un prolongement et non comme une nouvelle aventure. Or, le jeune ne va pas mener l’entreprise comme ses parents. Demain, l’exploitation ne sera plus la même.

Afin de prendre de la hauteur, il est nécessaire de sortir des « croyances » familiales. Dans certaines familles, on se dit : « deux frères ne peuvent pas travailler ensemble ». Dans d’autres : « il vaut mieux que mon enfant fasse de longues études ». Je connais un pharmacien qui rêvait d’être agriculteur, mais son père n’a pas voulu, car il travaillait très bien à l’école. Ce jeune homme le vit encore très mal aujourd’hui.

Les circonstances dans lesquelles le parent s’est lui-même installé vont inévitablement avoir un impact sursa vision de la reprise. Était-ce un choix, une injonction subie ou une décision par défaut ? Je vois un homme qui met des bâtons dans les roues de son fils, pourtant très motivé. Il exprime ainsi combien, pour lui, il a été difficile et frustrant d’assumer un choix imposé. Revisiter son propre parcours, avec son épouse ou un tiers, aide à prendre de la distance. Et puis, quel bilan faites-vous de votre activité ? Qu’en donnez-vous à voir : l’image d’un échec ou de la réussite ? Celle-ci aura un impact sur la volonté de transmettre ou non.

Par ailleurs, certains agriculteurs se sont tellement épanouis qu’ils ne veulent pas passer le flambeau, et n’imaginent pas que leur enfant puisse exercer de manière différente d’eux. Or, il s’agit de faire confiance dans la capacité de repreneur à évoluer et innover. La nouvelle génération est portée par un autre temps.

Attention à ne pas projeter un enfant qui fera ce métier par conformisme et à écarter un autre qui en aurait envie, ou risque de se poser la question plus tard. Désigner un enfant d’office, et parfois de manière unilatérale, n’est-ce pas garder une forme de pouvoir ? Alors que la transmission est un mouvement de lâcher prise… Le devoir des parents est de poser la question à chacun de leurs enfants : voudrais-tu être agriculteur ? L’héritage est en effet pour tous. Il faut permettre à chacun de le recevoir et de choisir.

(1) www.cabinetraphael.fr