Le Conseil constitutionnel a rendu, ce 7 août 2025, son verdict quant à la loi Duplomb. En décidant notamment de censurer l’article 2 relatif à la réintroduction de l’acétamipride sous certaines conditions, les Sages se sont attiré les foudres de la profession agricole.

Des filières dans l’impasse

Si le syndicalisme majoritaire (FNSEA-JA) salue la validation d’une loi qui « pose les bases essentielles et attendues sur des sujets clefs », la crainte est tout de même de mise pour certaines filières. Les syndicats citent notamment les productions de betteraves sucrières, de noisettes, de pommes ou de poires qui se voient toujours privées d’utiliser certains néonicotinoïdes, à l’inverse de leurs collègues européens. Ils demandent que les articles censurés puissent être retravaillés et « repris dans un prochain texte agricole ». Pour l'heure, la CGB (1) réclame au gouvernement des mesures de sauvegarde comme l'indemnisation des pertes causées par la jaunisse.

La ministre de l’Agriculture a fait savoir qu’elle avait engagé des travaux avec l’Inrae pour identifier les filières en danger. Les résultats de ces études devraient être connus à la rentrée. Par ailleurs, Annie Genevard entend poursuivre le travail d’harmonisation des règles phytopharmaceutiques en Europe « afin que les décisions soient prises au niveau européen et non plus au niveau national ». Un point que la ministre souhaite inscrire à l’ordre du jour des prochains Conseils européens.

Appel au consommateur

« Mais en attendant, l’urgence est là […] Achetez français, clame Annie Genevard. Soutenez les filières locales pour éviter une dépendance à des produits importés, souvent moins exigeants ».

Un appel au consommateur partagé par la Coordination rurale. « Face à la décision du Conseil constitutionnel, la Coordination rurale invite plus que jamais les consommateurs à favoriser les produits français », réagit le syndicat.

« Une victoire en demi-teinte »

Pour la Confédération paysanne, le retour du Conseil constitutionnel n’est qu’une « victoire en demi-teinte ». La censure d’une partie du texte « n’enlève rien l’intention première de ce texte : accélérer la fuite en avant de l’agriculture vers un modèle toujours plus productiviste ».

Dans un communiqué commun à d’autres structures agricoles comme le réseau Civam, ou des ONG environnementales (La ligue de protection des oiseaux, France nature environnement, Greenpeace, ou encore Générations futures), la Confédération paysanne s’attarde sur la suppression de l’article 2. « Les points soulevés par l’argumentaire du Conseil constitutionnel n’empêcheront en rien la réautorisation de ces substances toxiques dans le futur », s’inquiètent-ils.

« La décision du Conseil constitutionnel n’est qu’une étape dans un processus qui doit aboutir au retrait de la loi Duplomb », poursuivent-ils. La Confédération paysanne appelle ses adhérents à poursuivre la mobilisation dès la rentrée.

L’élevage de demain

Le maintien par le Conseil constitutionnel de l’article 3 qui relève les seuils des ICPE en élevage fait lui aussi polémique. Pour l’association Terre de Liens, celui-ci banalise « l’élevage industriel […] au détriment des élevages durables ».

Dans un communiqué commun, les associations pour la protection des animaux de ferme CIWF (2) et Welfarm se disent préoccupées pour le bien-être des animaux d’élevage. Cet article marque « une régression [qui] conduira inéluctablement à multiplier le nombre d’élevages industriels et le nombre d’animaux enfermés dans ces exploitations ».

En outre, les associations soulignent « le coup porté à la démocratie locale » alors que les réunions publiques seront remplacées par des permanences dans le cadre de nouveaux projets d’élevage.

(1) Confédération générale des planteurs de betteraves. (2) CIWF (Compassion in World Farming).