À midi, bœuf. Le soir, rebœuf. Le bœuf aux hormones est invité sur les plateaux télé et tout le monde y va de sa tirade. Halte, danger, y’en a marre ! On nous fait bouffer de la m… Et si on n’en mange pas encore, c’est pour demain. Et si ce n’est pas produit en France, ce sera bientôt importé.

À droite, à gauche, bleus, verts, jaunes, partis et mouvements, sans compter chanteurs, comédiens et autres experts de l’agriculture, il suffit de se brancher sur une émission qui traite de l’alimentation pour avoir droit à la ritournelle.

Comment le dire ? Combien de fois faut-il le dire ? Il n’y a pas de bœuf dopé aux hormones de croissance en France. Ni en production, ni en importation. Voilà presque trente ans que l’Europe a interdit l’importation de ces viandes, élevées surtout aux États-Unis et au Canada. Un contentieux a été ouvert devant l’Organisation mondiale du commerce et perdu en 1997 par les Européens, dans la mesure où l’impact sanitaire n’a jamais été prouvé. Mais l’Union a continué à refuser l’entrée. C’est à cette époque que les Américains, en rétorsion, ont taxé le roquefort. Le dossier du bœuf a-t-il été rouvert lors des récentes négociations commerciales ? Eh non ! Au risque de contredire les experts cités plus haut, en termes diplomatiques, cela fait partie des « préférences collectives » qui ne sont pas négociables et donc qui ne se discutent même pas. Certes, l’UE a dû accepter des importations de bœuf supplémentaires, cependant sans hormone. Ce n’est pas forcément mieux, mais il faut cerner les problèmes !

Toutefois rien n’y fait. Les faits, les textes, comptent moins que les déclarations moutonnières en tribunes ou sur les plateaux. Le plus désolant est quand cette critique émane d’un haut responsable politique, plusieurs fois ministre, titillé par l’élection présidentielle. Parfaitement au courant de ce qu’il en est réellement, mais sachant encore mieux que pour se faire élire, il faut dire ce que les citoyens ont envie d’entendre. Ou leur faire peur et apparaître comme leur sauveur.