Climato-dépendance
L’agriculture est de plus en plus climato-dépendante. En trois ans, la France a connu deux chocs climatiques, dont celui, historique, de cette année. Depuis la dernière guerre, on n’avait pas connu pareille mauvaise récolte. À cette irrégularité climatique s’ajoute la volatilité des cours, liée à la connaissance instantanée que l’on a désormais de ce qui se passe partout dans le monde. La première leçon à en tirer serait d’être encore plus précis et réactif quand les informations tombent. Le ministère de l’Agriculture a mis plus d’un mois à réagir à la certitude d’une récolte très faible.
Fonds dédiés, aides fiscales
En Australie, pays ultralibéral, les rendements vont de moins d’une tonne à l’hectare à plus de 5 tonnes. 1,5 tonne est le point mort pour une ferme de 20 000 hectares, classique là-bas. Depuis le « Farm Management Deposit » de 1999, l’État a créé plusieurs fonds dédiés aux exploitants. Ils peuvent y déposer entre 800 et 300 000 euros chaque année. À comparer à notre dotation pour aléas climatiques de 27 000 €. Seules limites : ces exploitants ne doivent pas avoir un revenu de plus de 800 000 € et leurs revenus hors exploitations ne doivent pas dépasser 60 000 €. Ils peuvent rapatrier ces sommes dans leurs exploitations quand ils craignent un déficit, sans être fiscalisés pendant un délai de sept ans. Ces sommes seront fiscalisées s’il s’agit de couvrir des besoins personnels.
Le tout assurance
Aux États-Unis, depuis le nouveau Farm Bill de 2014, les assurances récoltées sont multiples et subventionnées de 30 à 50 %. Les 14 % des producteurs qui assurent 86 % de la production, sont tous assurés. Par exemple, en blé, une ferme de 14 000 hectares dans le Kansas (principal État producteur de blé), a souscrit une assurance récolte classique « sécheresse et autres aléas climatiques ». Le coût s’établissait cette année à 6,1 euros par hectare.
Le tout stock
En Inde et en Chine, ce sont les États qui, en maîtrisant les stocks, règlent les prix intérieurs et agissent sur leur équilibre suivant les aléas climatiques. En Inde,ils stockent jusqu’à 50 % de la récolte. En 2015, la Chine avait en réserve un tiers des stocks mondiaux de maïs. Cette année, en déstockant, elle a fait baisser les cours mondiaux. Sur son marché intérieur, les prix du blé sont de 350 euros, pendant que sur le marché mondial les cours sont à 140 euros ! Ces systèmes, mis en place par des États peu démocratiques, sont loin d’être parfaits, en particulier en raison de la médiocre la qualité de leurs stocks.
Système mixte
En France, on pourrait s’inspirer davantage du système australien. Certes, il ne résout pas tout, car il n’existe aucune aide de l’État. De nombreuses fermes sont à vendre, dont la plus grosse de 11 millions d’hectares. Il faut panacher mesures fiscales et aides. Les exploitants doivent pouvoir agir systématiquement sur le long terme, car les aléas climatiques et la spéculation s’installent durablement.
(1) Publié en novembre aux Éditions de La France agricole.