Soulagés ! Les agriculteurs argentins attendaient, inquiets, la décision de la Commission européenne sur l’utilisation du glyphosate dans l’UE (lire page 22). « On est soulagés de ce sursis de 18 mois. Mais on sait qu’à terme, la décision d’interdire le glyphosate devrait être prise par l’UE. Nous devrons nous adapter si le marché européen s’ouvre aux exportations agricoles de l’Argentine », réagit Patrick Maingard, membre de la Société rurale de Buenos Aires. Pilier d’une croissance perdue, les exportations agricoles sont l’un des axes forts du nouveau gouvernement pour sortir le pays de l’ornière.

Or, avec une consommation qui oscille entre 4 et 8 litres par hectare et par an, grimpant à 12 litres pour certaines parcelles, l’Argentine se positionne en tête des consommateurs par habitant de glyphosate dans le monde. Un produit en vente libre. Dans les provinces agricoles du pays, il suffit de se présenter dans n’importe quelle droguerie avec un bidon vide en demandant du « mata yuya » (« tueur de mauvaises herbes ») pour être servi. Peu cher, facile d’accès, il représente 60 % des pesticides utilisés en Argentine.

Résistance

La perspective d’une ouverture du marché européen, conjuguée à la mobilisation de la société civile et à la diminution de son efficacité sur les adventices pourraient toutefois signer l’arrêt de mort du glyphosate. « Les plantes se sont adaptées génétiquement, avec pour conséquence une diminution de l’efficacité de la molécule, explique Martín Vila Aiub, chercheur en agronomie de l’université de Buenos Aires. Les producteurs utilisent alors des quantités encore plus importantes et ne font qu’amplifier le problème : leur résistance augmente. »

Lors de la réunion du G20 en Chine, début juin, l’Argentine et le Brésil avaient fait part de leur intérêt à ce que la Commission renouvelle l’autorisation du glyphosate. Hors Union, les nouvelles normes européennes font aussi grincer des dents.