«Je me suis installée le 1er janvier 2013 et, le 4 février suivant, j’étais opérée en raison d’une arthrose sévère », raconte Aurore Le Moigne, productrice de lait à Plonévez-du-Faou (Finistère), en Gaec avec son mari Frédéric sur une ferme de 210 ha avec 200 vaches. La jeune éleveuse avait 27 ans et deux enfants de 3 ans et 18 mois.
Pas de quoi arrêter cette battante dont les aléas de la vie ont forgé le caractère. Ses soucis de santé démarrent le jour de sa naissance par césarienne, lorsqu’un staphylocoque doré se loge dans son fémur droit. Entre 6 et 15 ans, Aurore subit cinq interventions chirurgicales, passant ses étés en rééducation et les cours de sport du collège chez le kiné. Ce parcours médical ne la dissuade pas de suivre des études agricoles (bac CGEA et BTS). « Mes parents ne m’ont jamais élevée comme une handicapée. J’aidais sur l’élevage quand c’était nécessaire. »
Après trois années de salariat en production porcine, elle décide de remplacer son beau-père et s’associe avec son mari et un oncle. « Des douleurs dans le bassin se sont accentuées après ma deuxième grossesse. Le diagnostic est tombé : il fallait opérer sans attendre et placer une prothèse de hanche. »
Éviter d’enjamber
Pendant sa convalescence, la MSA l’oriente vers la Sameth (Service d’appui au maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés). Traite, soins aux veaux, nettoyage des logettes, alimentation…, une ergonome étudie les différents postes de travail et leurs contraintes. « Sur ses conseils, nous avons installé les niches à veau à hauteur d’homme pour éviter de se baisser. » L’idée est de solliciter le moins possible la hanche en évitant d’avoir à enjamber. Le couple achète un micro-tracteur d’occasion et un taxi à lait motorisé. Ces matériels ont été co-financés à 30 % (du fait qu’ils peuvent servir aux autres associés) par l’Agefiph (Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées). Lors de la construction de la nouvelle stabulation, en 2017, les passages d’homme ont été réalisés de plain-pied.
« Une prothèse se remplace tous les quinze ans. Je ne pourrai pas la changer indéfiniment. Je me ménage pour qu’elle vieillisse au mieux. » Particulièrement sensibilisé, le couple réfléchit au remplacement du roto de traite, qui a 15 ans. Il s’agit aussi de préserver les épaules. Isabelle Lejas