La volonté de boucler un projet d’installation ne doit pas occulter les précautions à prendre pour que le démarrage soit le plus serein possible. Du chiffrage au choix des investissements ou encore la prévention des aléas, rien ne doit être négligé. « Je remarque que c’est rarement au cours des premiers mois d’installation que ça coince », explique Amandine Bernard, fondatrice de « De la Terre et des Hommes » qui propose des conseils en gestion de l’entreprise agricole. « Les financements ont été débloqués et il y a les dépenses en face. La première année, c’est un peu la lune de miel. À condition que le calibrage du projet ait été bien fait. »

Bien calibrer les emprunts
Dans les financements, la trésorerie ne doit pas être relayée au second plan. « Une des erreurs les plus courantes, c’est que le besoin en trésorerie n’ait pas été anticipé ou en tout cas pas assez, relate-t-elle. Il existe encore des situations dans lesquelles le prêt de besoin en fonds de roulement est trop faible. »
La périodicité des emprunts est aussi importante. « Il peut arriver que la première échéance du nouvel installé tombe au mois d’avril. Or si c’est un céréalier, c’est justement le moment où sa trésorerie est la plus fragile car il n’a pas encore commercialisé », évoque Amandine Bernard. Tous ces éléments doivent être inclus dans un plan de financement adapté. Enfin, partir avec un apport (qui peut être la DJA) qui servira d’épargne de précaution permet de pallier les imprévus.
Bien évaluer l’investissement
« C’est un cas classique à la reprise d’une structure existante. Certains éléments ne sont pas intégrés au chiffrage et c’est la trésorerie qui doit prendre le relais. » Comme par exemple, « ne pas intégrer une marge de sécurité de 15 à 20 % sur les coûts liés à la construction d’un bâtiment », ou une enveloppe pour des réparations de matériels repris qui tomberait en panne ou un remplacement. Des aléas peuvent aussi être anticipés. « Il est intéressant de faire un diagnostic sur le troupeau ou une expertise sur le matériel avant la reprise. C’est un coût au départ, mais qui peut se justifier. »
D’autres coûts viennent potentiellement grever la trésorerie dès le départ. « Avec les investissements fonciers, la formalisation de baux à long terme ou la réalisation d’actes juridiques, il peut y avoir des frais de notaire ou de juriste, des frais de garantie ou d’assurance qui vont rapidement se chiffrer à plusieurs milliers d’euros », prévient la conseillère. Il faudra donc penser à intégrer ces montants au financement initial.
Des estimations réalistes
Estimer le prix de vente de ses futures productions est un élément crucial de son projet et sujet à caution. « Il faut le démystifier, car il n’est pas fait pour être juste », avance toutefois Amandine Bernard. « Ces prix estimés sont théoriquement calculés être dans les clous quatre années sur cinq. Donc c’est sur cette base que l’on peut faire l’estimation. On ne peut pas prédire l’avenir mais la moyenne sur une période permet d’intégrer un certain nombre d’aléas », ajoute-t-elle.
« Rien ne sert non plus d’être trop pessimiste, simplement pour être sûr. Car ça peut pénaliser la crédibilité de son projet. » Il est primordial aussi d’intégrer un objectif de revenu, en cohérence avec ses besoins et son contexte de vie (enfants…).
Précautions et prévention
Reste que les capacités de financement ne sont pas extensibles et que tous les risques ne pourront donc pas être anticipés. Et pour certains, l’assurance peut être une bonne option. « L’assurance récolte ne paraît pas toujours être la solution idéale car elle coûte cher, mais quand on s’installe, il n’y a pas le matelas de sécurité que peuvent avoir les autres exploitations », avance Amandine Bernard.
« Pourtant pour la première année avec la multirisque climatique il y a 75 % de prise en charge avec la Pac. Les assurances accordent aussi de fortes réductions pour les nouveaux installés. » Prévoir au moins 10 ou 15 % de marge de sécurité par rapport à l’EBE permet également de pallier en partie les aléas. L’EBE doit permettre de couvrir les emprunts, les prélèvements privés et la marge de sécurité.