« Je rêvais d’être agriculteur depuis mon enfance vécue auprès de mes grands-parents éleveurs dans les montagnes ambertoises. Je doutais que cela soit possible, mais je le suis aujourd’hui au terme d’un parcours atypique ponctué de chances », explique Sylvain Vernière, installé depuis le 1er janvier 2019 à Chauriat, dans le Puy-de-Dôme. Après des études agricoles et un diplôme d’ingénieur agronome en poche, le jeune homme travaille neuf ans chez le constructeur agricole Lely au service du matériel de fenaison.

Un voisin ayant besoin d’aide sur sa structure céréalière lui met le pied à l’étrier en 2017. Recherchant des cultures à valeur ajoutée, Sylvain loue, puis acquiert alors des parcelles de vignes, une passion datant de son adolescence, scandée d’emplois saisonniers agricoles. Les opportunités s’enchaînent ensuite avec la reprise de 45 ha à un cédant partant à la retraite, puis de 45 ha sur le site des essais de pneus agricoles de Michelin et enfin de parcelles consacrées à la culture de bulbes cédées par un voisin retraité.

Sylvain Vernière affectionne le travail sur ses vignes en cépages chardonnay et gamay destinés à l’AOP Côtes d’Auvergne. (©  Monique Roque)

Des cultures à forte typicité

« L’ail rose de Billom est une richesse patrimoniale pour notre secteur. Alors que plus de 90 % de l’ail est importé de Chine et d’Argentine, je suis fier de produire de l’ail auvergnat de qualité supérieure », souligne Sylvain. Il le vend en direct sur le marché hebdomadaire d’Ambert, sur deux foires importantes à Billom, « capitale » de l’ail rose, et à Riom-ès-Montagnes lors de la fête du bleu d’Auvergne, ainsi qu’auprès d’un metteur sur le marché. Les surfaces en ail, oignon et échalote vont augmenter en 2024 car une demande croissante est au rendez-vous. La fédération de l’ail d’Auvergne, syndicat des producteurs d’ail, porte la candidature à une reconnaissance IGP de l’ail rose de Billom.

L’ail rose de Billom est planté en janvier et récolté en juillet. Il est tressé en bottes de 1,5 kg avant d’être mis à sécher. (©  Monique Roque)

La filière est aussi activement soutenue par la confrérie des grands goussiers, l’association des champs d’ail de Billom, l’Inrae de Clermont-Ferrand et l’association de restaurateurs des toques d’Auvergne. Le jeune cultivateur développe aussi une production d’ail blanc pour les établissements Rochias produisant de l’ail déshydraté à Issoire. Quant aux vendanges issues d’un vignoble volcanique unique en France, elles sont vendues à Desprat Saint-Verny produisant des AOP Côtes d’Auvergne.

Les céréales de Sylvain Vernière, coopérateur Limagrain, entrent dans un circuit local grâce au moulin d’Ennezat et à une transformation en pain Jacquet à Gerzat. « Une exploitation peut être modernisée sans que l’on perde pour autant le bon sens indissociable de notre métier », précise Sylvain, attaché aux valeurs traditionnelles et respectueuses de ses terres. Les pommes de terre sont encore cultivées pour partie à Beurières, sur l’exploitation grand-parentale à laquelle il reste très attaché.

Un système cohérent

La diversité des cultures en place rend le système exigeant en travail. 600 à 650 heures de main-d’œuvre saisonnière sont nécessaires aux pics des travaux. Sylvain emploie des jeunes, pas nécessairement issus du milieu agricole car « nous devons aussi communiquer sur notre métier. Ces embauches me rappellent ma propre jeunesse. » Une production d’asperges va démarrer en 2024 pour étoffer la gamme en vente directe.

« Je n’aurais pas pu franchir le pas d’une installation sans le soutien de mon épouse, qui travaille à l’extérieur avec son diplôme d’ingénieur agronome. Mon système de cultures diversifiées, avec une part de vente directe, est chronophage », poursuit Sylvain. Travailler avec passion renforce aussi le risque de consacrer tout son temps à l’exploitation. Mais le cultivateur a à cœur de préserver sa vie familiale. « Je souhaite aussi communiquer sur mon métier et nos productions locales afin de les valoriser auprès des consommateurs. Nos terres sont pleines de ressources ! »