La Tis (lire l'encadré) s’inscrit dans la logique de réduction de l’usage des pesticides. À l’origine, elle avait pour objectif l’éradication des ravageurs (voir encadré onglet). Désormais, elle est plus considérée comme une méthode qui peut s’avérer très efficace et complémentaire dans un programme de lutte intégrée. Elle est ainsi compatible avec la confusion sexuelle et doit s’accompagner des pratiques prophylactiques habituelles. « Au lieu d’intervenir 20 fois avec des insecticides durant la saison, on peut traiter une fois pour abaisser la population puis prendre le relais avec la Tis et ainsi réduire l’emploi de pesticides jusqu’à 95 % », souligne Ghais Zriki, responsable des programmes Tis au CTIFL (1).
Déjà éprouvée
En revanche, ce n’est pas une technique qu’un producteur peut appliquer seul mais bien un projet au niveau régional, voire national. La Tis n’est pas adaptée à toutes les espèces, ni même à toutes les particularités géographiques et climatiques et pour réussir, il faut bien connaître l’écologie de l’espèce ciblée. Autres conditions à remplir : les femelles visées ne doivent pas avoir de multiples accouplements ; la densité de la population doit être faible en début de saison ; et il faut pouvoir les élever en quantité artificiellement et dans un milieu d’élevage pas trop coûteux.
Déjà employée depuis longtemps ailleurs, comme au Canada contre le carpocapse (Cydia pomonella), ou contre la mouche méditerranéenne des fruits (Ceratitis capitata) en Espagne, en France, elle pourrait l’être sous peu contre les moustiques. Trois projets pilotes sont en cours sur le territoire dans le but d’apporter les preuves de l’efficience de la Tis sur des ravageurs des fruits. Il s’agit de « CarpoTis-Noix » sur carpocapse, « SuzuKIISS : ME » sur Drosophila suzukii et de « CeraTis Corse » sur Ceratitis capitata.
Pour le moment aucun programme n’est appliqué en France. Et il faudra certainement encore du temps pour la déployer. « Déjà pour mettre en place des essais, il faut d’un point de vue réglementaire, obtenir des autorisations de la part de nombreuses instances, alors pour lancer un programme… Et même si les insectes viennent de France, il faut aussi enquêter sur les aspects économiques et sur l’acceptation sociétale de ces lâchers de masse », complète l’expert.
Si l’on sait que la Tis fonctionne ailleurs, il faut donc avant toute chose la tester et prouver son intérêt avant de la mettre en place chez nous. Par exemple, avec Carpotis-noix, des carpocapses stériles ont été lâchés en Isère pour la deuxième année afin d’étudier l’aspect logistique (production de papillons, marquage, stérilisation, longévité et dispersion sur le terrain). En 2023, l’efficacité sera testée sur noyers.
(1) Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes.