Quelles seraient les conséquences d’une restriction, voire d’une interdiction des fongicides à base de cuivre ? C’est sur cette question que s’est penchée l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), qui a rendu ses conclusions le 16 juillet 2025. Cette substance active fongicide identifiée comme « candidate à la substitution », présente « des risques pour l’environnement et dans une certaine mesure aussi, pour la santé humaine », rappelle l’Anses.
Substitution « souvent économiquement impactante »
L’Anses a évalué plusieurs scénarios de substitution de court terme, avec des « combinaisons d’alternatives d’ores et déjà disponibles sur le marché », telles que les variétés résistantes, la prophylaxie ou les produits de biocontrôle. Elle s’est intéressée uniquement aux situations suivantes, qui seraient « les plus problématiques » :
- La filière pomme, contre la tavelure, en agriculture conventionnelle et biologique ;
- La filière pomme de terre, contre le mildiou, en agriculture biologique ;
- La filière vigne, contre le mildiou, en agriculture conventionnelle et biologique.
Pour ces productions, la substitution est « techniquement envisageable, mais toujours agronomiquement difficile et souvent économiquement impactante pour les utilisateurs », écrit l’Anses. Du point de vue économique, l’agence pointe « des limites quant à la faisabilité d’une transition soutenable » sans « mesures fortes d’accompagnement » dans le modèle actuel.
Pertes de rendement et hausse des coûts de production
« Presque tous ces scénarios alternatifs se traduisent en effet par une baisse de la performance technico-économique des exploitations », écrit l’Anses. Cela s’explique à la fois par « une augmentation des pertes de rendement et/ou de valeur produite » et par « une augmentation des coûts de protection (les alternatives étant généralement plus onéreuses que les applications de cuivre, très peu coûteuses). »
La baisse de performance technico-économique est même « très importante » pour certaines combinaisons dans un scénario sans cuivre. Dans ce cas, les impacts « pourraient ne pas être compatibles avec la pérennité économique de certaines exploitations. »
L’Anses pointe globalement plusieurs risques :
- Des pertes de revenu potentielles « non négligeables » pour les agriculteurs, mais aussi pour les autres acteurs des filières ;
- Des difficultés pour répondre à des cahiers des charges ;
- Des pertes de compétitivité sur les marchés nationaux ou à l’export ;
- Un risque de déconversion en agriculture biologique et/ou une délocalisation de la production dans des régions avec des contraintes réglementaires différentes ;
- Un recours accru aux fongicides de synthèse.
L’agence estime que les répercussions des pertes de rendement induites par la substitution du cuivre « sont susceptibles d’être importantes et méritent d’être explorées plus en détail », notamment pour les quantifier. Elle indique en effet que les données disponibles étaient « dans l’ensemble peu nombreuses et peu accessibles. »
Prendre en compte l’impact plus important pour la bio
« L’enjeu de la substitution, totale ou partielle, [du cuivre est] asymétrique », insiste l’Anses. Il est « critique en production biologique, beaucoup plus marginal en production conventionnelle (au moins tant que les fongicides de synthèse resteront disponibles et diversifiés sur le marché). » L’agence estime que cela doit être pris en compte « lors de toute décision impliquant une réduction des utilisations du cuivre ».