Installé depuis dix ans à Gorges dans la Manche, Julien Brunet, associé du Gaec des Lions d’Or avec Élodie Lepetit, sa compagne, exploite 45 hectares de marais loués à la commune. L’arrêt des pompages de la tourbière de Baupte en janvier 2026 le privera d’au moins 20 hectares qui seront inondés. La valorisation des 25 autres hectares de marais deviendra aussi plus aléatoire selon les conditions climatiques. En compensation partielle de ces pertes, il a signé au printemps un bail d’un an avec la Safer de la Normandie pour 11 hectares situés à 7 kilomètres du siège de l’élevage.

Des pertes fourragères

À la suite de la décision de justice condamnant l’extraction de la tourbe pour cause de destruction d’espèces protégées, 700 hectares de marais seront impactés. Au moins 300 hectares seront submergés du fait de l’arrêt de l’activité prévu en janvier 2026. 12 des 57 exploitations concernées se sont vues attribuer 113 hectares temporairement.

Exploitant 127 hectares et produisant 1,15 million de litres de lait, le Gaec des Lions d’Or est dans ce cas. La chambre d’agriculture a chiffré ses pertes fourragères à 10 000 € auxquelles s’ajoutent 3 200 € de MAE (mesures agroenvironnementales) pour fauche tardive. « Avec 45 hectares en moins, nous risquons de ne plus pouvoir respecter les règles de l’AOP beurre et crème d’Isigny, exigeant une superficie et une durée de pâturage minimales », s’inquiète Julien Brunet.

« En dénonçant le bail des 20 hectares de marais inondés, nous allons perdre les MAE et les aides Pac, même si ces dernières doivent pouvoir être transférées. » Soulagé de la première attribution de 11 hectares, Julien aimerait les louer à nouveau en 2026 avant de devoir se positionner pour une acquisition. Il s’inquiète également de l’accessibilité des 25 hectares aujourd’hui non compensés : « Au total, nous avons besoin de 20 à 25 hectares hors marais pour sécuriser notre système ».