Cela a tout l’air d’un rétropédalage. Après l’annonce surprise d’expérimentations sur « la réduction, voire la suppression » du contrôle des structures, le projet gouvernemental vient finalement d’être supprimé du projet de loi qui devait le porter. Difficile de croire que cette disposition ô combien sensible, qui avait suscité l’ire des syndicats agricoles, n’était motivée que par de seules considérations budgétaires… Cela montre en tout cas que la question de l’accès au foncier est tirée à hue et à dia jusqu’au sommet de l’État. Dans le même temps, est en effet promise, pour 2018, une grande loi foncière qui pourrait être régulatrice ! Et d’ailleurs, c’est un apôtre du droit de préemption renforcé pour les Safer et un contempteur des méthodes de contournement du contrôle des structures, le député PS Dominique Potier, qui sera co-rapporteur d’une mission parlementaire susceptible d’inspirer cette loi…
Si le législateur est poussé aujourd’hui à se prononcer, c’est que la question foncière et notamment sa financiarisation via des capitaux extérieurs, est devenue particulièrement prégnante. Si cette tendance est enclenchée depuis quelques années avec la montée en puissance des formes sociétaires, la dernière déflagration est venue d’achats de terres réalisés par un groupe industriel chinois, au nez et à la barbe de la Safer, pour un total de 2 800 hectares. Mais si l’affaire a été fortement médiatisée, elle reste pour l’instant un fait embryonnaire. Aujourd’hui, si les contours du modèle familial sont repoussés, c’est plus le fait d’autres formes de portage (holdings, financements complémentaires par des investisseurs, certains allant jusqu’aux capitaux propres). C’est ce phénomène nouveau que nous analysons dans un dossier d’investigation de treize pages (voir pages 46 à 59). Face à des exploitations de plus en plus lourdes à transmettre, cette évolution semble inéluctable. D’où l’importance de trouver des garde-fous, pour que le chef d’exploitation reste maître à bord et que la rémunération du capital ne vienne complètement grever celle du travail…