Les propos d’Emmanuel Macron du jeudi 6 novembre 2025 se disant « plutôt positif » à l'égard du projet d'accord de libre-échange entre l’UE et le Mercosur ont poussé les agriculteurs à manifester. Mercredi 12 novembre 2025, la mobilisation de Toulouse en marge du déplacement du chef de l’État a fait grand bruit, mais d’autres actions partout en France ont aussi eu lieu.
Dans près de 23 départements français, plusieurs actions se sont déroulées sous les couleurs des FDSEA locales. De l’Occitanie, en passant par la Normandie, le Grand Est ou encore les Hauts-de-France, les manifestants du principal syndicat agricole français ont répondu présent.
« Si on se mobilise, c’est pour montrer qu’on est déterminé »
À Beauvais, vers midi, un cercueil estampillé « agriculture » était déposé devant la préfecture. Une petite centaine d’agriculteurs se sont réunis pour protester contre les propos d’Emmanuel Macron, mais aussi contre une nouvelle taxe sur les engrais importés.

« On a déposé un cercueil pour imager la mort progressive des agriculteurs, explique le Picard Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA. Si on se mobilise, c’est pour montrer qu’on est déterminé à se faire entendre. » Les agriculteurs ont été reçus par le préfet de l’Oise afin d’aborder notamment le sujet de l’accord UE-Mercosur. Le représentant syndical craint d’être confronté à une « concurrence déloyale » avec les pays d’Amérique du Sud. « Ils utilisent de phytos qui sont interdits chez nous, le coût de leur main-d’œuvre est moins cher, leurs bovins sont bourrés d’hormones de croissance », illustre-t-il. « La FNSEA dit non à tout ça. »

Le président Emmanuel Macron, qui s’est entretenu mercredi 12 novembre avec une délégation d’agriculteurs à Toulouse, « a été extrêmement clair » pour leur dire que le projet d’accord entre l’UE et le Mercosur, « tel qu’il existe aujourd’hui, recueillera un non très ferme de la France », a rapporté la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard. « Une nouvelle fois, on est dans l’incompréhension totale. On voit bien que Macron va là où le vent le porte », considère Luc Smessaert.
« Il y a un ras-le-bol de la part des agriculteurs »
À Amiens, dans le département voisin de la Somme, les tracteurs et les pailleuses étaient aussi de sortie autour de 18 heures. « Macron nous met sur la paille », lisait-on sur une banderole. Les rues amiénoises ont été le théâtre d’une manifestation qui a réuni près de 150 agriculteurs, selon les manifestants.
« Il y a un ras-le-bol de la part des agriculteurs. On ne fait plus confiance au président de la République. On souhaite une prise de conscience de la part des politiques et des actes concrets, affirme Fabien Hamot, président de la CGB 80. La prise en compte politique n’est pas là. L’objet de cette mobilisation, c’est un rappel à l’ordre. » En dehors de la mobilisation d’Amiens, des « feux de colère » ont été embrasés sur certains ronds-points et des actions ont pris place devant les sous-préfectures de Péronne, Montdidier ou encore Abbeville.
Les agriculteurs se sont aussi mobilisés à Laon, dans l'Aisne, postés au rond-point de l’Europe. « Nous avons mis en place un barrage filtrant pour interpeller les transporteurs de produits importés », raconte Bruno Cardot, betteravier près de Saint-Quentin.
Cet agriculteur, représentant de la CGB, estime que « pour la filière de la betterave-sucre-éthanol, l’accord avec le Mercosur entraîne l’importation de 190 000 tonnes de sucre et de 8,2 millions d’hectolitres d’éthanol, sans droit de douane ». Pour le Picard, il s’agit d’une réelle « ineptie » qui va « nuire à l’agriculture française ».
« On sait faire pression »
Des mobilisations se sont poursuiviees parfois jusque tard dans la nuit. Vers 22 heures, les tracteurs défilaient encore dans les rues de Lille (Nord). Un des boulevards principaux de la ville a été bloqué pendant quelques minutes. « En interpellant la population, on veut prouver qu’on n’est pas content et qu’on sait faire pression », se justifie Benoît Raux, secrétaire général de la FDSEA 59.
Devant la préfecture d’Arras, près de 200 personnes et 90 tracteurs se seraient réunis. À 19h30, les leaders syndicaux ont échangé avec le préfet. Jean-Pierre Clipet, secrétaire général de la FDSEA du Pas-de-Calais, se dit prêt à « se battre pour que les discussions portent leurs fruits ». « S’il faut retourner sur les autoroutes comme il y a deux ans, personnellement, ça ne me pose aucun problème », conclut-il.
La FNSEA demande à Emmanuel Macron de s'opposer fermement à l'accord lors du sommet européen du 18 décembre prochain.