Cette réunion du Comité social d’entreprise était la première réunion d’information en vue d’une consultation sur le projet de restructuration de l’entreprise sur les sites de Cagny (Calvados), Eppeville (Somme) et Marseille (Bouches-du-Rhône), dont la mise en œuvre est prévue au premier semestre 2020, après la campagne sucrière 2019/2020 et la campagne sirop 2020.
Durant trois heures, les élus syndicaux ont posé des questions par rapport aux documents qui leur avaient été remis en amont, notamment au sujet du contexte économique.
« Attitude protectionniste »
« La direction est restée droit dans ses bottes », a déploré Loïc Touzé, délégué syndical central FO, à la sortie. Il a dénoncé une attitude « protectionniste » de Südzucker, au détriment de la France qui « encaisse 65 % de la baisse » de production de sucre dans l’ensemble du groupe.
Dans le détail, la maison mère allemande de Saint-Louis Sucre souhaite supprimer 74 des 82 postes de la sucrerie de Cagny (Calvados) et 53 des 58 que compte le site historique de conditionnement de Marseille.
À la sucrerie d’Eppeville (Somme), 76 des 126 salariés, dédiés à la production, seraient reclassés à « poste équivalent » dans le site voisin de Roye distant de 25 km, tandis que la plupart des salariés restants seraient maintenus sur le site, notamment pour assurer des activités de déshydratation et de stockage.
Arrêt de production pour certains
Au-delà des salariés, ce sont des centaines de planteurs de betteraves à sucre qui risquent, faute de débouchés, de voir leur modèle économique remis en cause : 1 036 planteurs qui travaillaient pour Cagny et 1 268 planteurs autour d’Eppeville.
Ceux de Cagny, isolés, n’ont pas d’autre solution pour écouler leur production et devront, si la situation en reste là, renoncer à la culture de la betterave. Dans la Somme, une partie des agriculteurs pourraient écouler leurs betteraves vers Roye, voire à la concurrence, selon M. Touzé. Mais « il y a aussi des gens qui seront dans la même configuration que dans un bassin isolé comme Cagny » et devront arrêter de produire faute d’autre usine à proximité, craint Franck Sander, président de la CGB (Confédération générale des planteurs de betteraves).
Pour éviter cette issue tragique, les betteraviers souhaitent présenter un projet de reprise des sucreries de Saint-Louis à Cagny et Eppeville le 13 mai à la direction de Südzucker.
« Plan nécessaire »
Saint-Louis Sucre a assuré jeudi dans un communiqué enregistrer « des pertes depuis cinq années » et se heurter à un « marché extrêmement difficile, contexte commun à toute l’industrie sucrière ». Le groupe sucrier a ainsi estimé que ce plan était « nécessaire pour assurer sa pérennité ».
Lettre ouverte de parlementaires
Dans une lettre ouverte publiée le même jour, le député de l’Aisne Julien Dive fait « appel au ministre de l’Économie, afin d’appuyer de son engagement auprès du ministre de l’Agriculture dans les négociations à mener entre le groupe Südzucker et les planteurs disposés à reprendre les deux sites de Cagny et d’Eppeville. » La lettre est cosignée par les présidents de Région Hauts-de-France (Xavier Bertrand) et Normandie (Hervé Morin), ainsi que 12 parlementaires des circonscriptions concernées.
« L’urgence et le bon sens obligent à trouver des solutions pour maintenir ces sites et empêcher l’irréversible, écrivent les signataires. C’est la raison pour laquelle les planteurs ont annoncé être prêts à se regrouper et reprendre l’outil industriel pour pérenniser la production. » Ils font état des planteurs qui « ont commencé à faire des expertises sur la partie industrielle, à travailler sur un plan de financement avec des partenaires, et étudier les éventuels débouchés. » Pour les parlementaires, « ce plan de reprise ne pourra aboutir que si le groupe Südzucker laisse l’opportunité à ces planteurs de reprendre l’outil industriel. »