« Si je ne surveille pas mes parcelles pendant une journée, c’est quatre hectares qui y passent ! » À Schweighouse, près de Mulhouse dans le Bas-Rhin, Nicolas Dieterich doit faire face à des dégâts récurrents de corvidés qui déterrent les grains à peine semés, percent les bâches des silos et des bottes enrubannéess. Âgé de 33 ans, Nicolas est en Gaec sur 140 hectares, dont 35 hectares de maïs, et 90 mères limousines.
Trois demi-journées de formation
En 2019, il est l’un des 30 jeunes agriculteurs à s’inscrire pour obtenir son permis de chasse (200 €). « Chaque agriculteur devrait le passer pour pouvoir protéger ses cultures », estime-t-il. La formation comprend deux demi-journées dans un ball-trap, une autre en salle ponctuée par un questionnaire concernant la connaissance de la faune, des armes et de la législation. Elle s’achève par des tirs à blanc, puis à balles réelles. « Le maniement de l’arme est la principale cause d’échec à l’examen », note Nicolas.
Nicolas Dieterich s’est équipé d’un calibre 12 d’occasion (800 €) pour le corbeau et d’une carabine 7.64 (800 € également) pour le sanglier et le chevreuil. L’armoire blindée (300 €) à domicile est obligatoire pour les armes et les munitions (de 60 à 80 centimes par cartouche plomb n° 4 en 36 g, de 1,70 € et jusqu’à 5 € la balle) stockées séparément.
Une demande de dérogation de tir de destruction
Avant d’avoir des dégâts, Nicolas dépose une demande de dérogation de tir de destruction à la DDT. Selon l’année, elle est accordée jusqu’au 30 juin ou au 31 juillet. « L’idéal est de sortir à l’aube, poser des appelants corbeau en plastique, se poster dans une haie à 30 mètres, et laisser tourner les premiers arrivés, puis tirer. Trois touchés pour cinq cartouches, c’est un bon ratio », énonce Nicolas, qui accroche ensuite les cadavres en dissuasion et observe que « ça produit son effet ».
« Je limite les dégâts, mais sans réduire la pression, juge Nicolas. Il faudrait agir sur Mulhouse où les corbeaux nichent. Depuis trois ans, élus et agents de la ville font semblant de nous comprendre. Mais rien n’avance. Le corbeau a une espérance de vie de 50 ans. Si la population continue de croître, dans cinq ans, les tirs ne suffiront plus. »