Le sujet de l’artificialisation des terres en Allemagne est revenu dans le débat au détour de l’interview récente d’un responsable national du parti politique des Verts. Anton Hofreiter a soutenu l’interdiction de construire de nouvelles maisons individuelles dans un quartier de Hambourg. La polémique qui s’ensuivit n’a pu occulter le bilan mitigé sur ce sujet.

Objectif reporté à 2030

Avec 56 hectares engloutis chaque jour par des logements et des axes routiers, le rythme de l’artificialisation des terres a certes considérablement baissé depuis le début des années 2000. Le recul annuel représente environ 0,1 % de la SAU (1) allemande, qui est de 16,7 Mha, mais le gouvernement voulait ramener l’artificialisation sous le seuil des 30 ha quotidiens. L’objectif est repoussé à 2030.

« Si l’on considère les objectifs européens, on devrait être à moins de 20 ha à cette échéance », relève Detlef Grimski, expert à l’Office fédéral pour l’environnement (UBA). « Le recul de l’artificialisation n’est pas seulement le fruit de mesures contraignantes, il découle aussi des variations de la conjoncture dans le secteur de la construction, précise Wolfgang Köck, du Centre de recherche sur l’environnement (UFZ). Les chiffres actuels ne comprennent pas les évolutions des deux trois dernières années. La tendance serait plutôt à la hausse, avec un mouvement vers les périphéries des grandes villes. » Si certains Länder se sont dotés d’un objectif propre, d’autres non. Et la réglementation reste peu contraignante.

Le DBV, principal syndicat agricole, partisan d’un objectif 0 ha, préconise des mécanismes d’économie de surface obligatoires et souhaite un système de certificats, sur le modèle du CO2. Chaque commune recevrait un contingent, qu’elle pourrait revendre à celles ayant des besoins de construction dépassant leur quota. Une alternative serait un quota fixe par commune, sans possibilité d’échange. Le DBV est séduit par le premier instrument, mais souligne qu’il pourrait creuser un fossé pour les régions à la traîne économiquement.

Manque d’ambition politique

« Personne n’est prêt à rendre l’objectif contraignant. La sphère politique se contente d’appels », constate Wolfgang Köck. Il existe une crainte d’un renchérissement du foncier, défavorable aux classes moyennes, alors que la question du logement est déjà délicate outre-Rhin. DBV pointe du doigt un autre mécanisme qui fait perdre des surfaces agricoles. Quand des infrastructures sont construites en zone naturelle protégée – forêt par exemple –, la surface occupée doit être compensée ailleurs, avec rémunération du propriétaire. Il peut donc être tentant pour des agriculteurs de proposer leur foncier afin d’accueillir ces nouvelles surfaces protégées, qui n’auront plus de vocation agricole. La profession est assise entre deux chaises. Les terrains vendus pour bâtir ou proposés en compensation génèrent des recettes pour certains acteurs du monde agricole, au détriment de la surface utile. Luc André

(1) Surface agricole utile.