91 feux de forêt ont été recensés depuis le début de l’année dans l’Aude, ravageant près de 2 900 hectares, dont 2 100 hectares lors du dernier incendie aux portes de Narbonne. Cultures, prairies, forêts, ruchers : aucun type de production n’a été épargné. « À la même période, l’an dernier, le compte était de 56 feux et 53 hectares brûlés. Et nous ne sommes qu’au début de l’été. Le constat est alarmant », s’inquiète Ludovic Roux, le président de la chambre d’agriculture de l’Aude.
« On prêche dans le vide »
« Cela fait des années qu’on alerte les pouvoirs publics pour que soit maintenue une activité agricole dans nos territoires, mais on prêche dans le vide », déplore le président du Syndicat des vignerons de l’Aude, Damien Onoré. « L’agriculture joue un rôle déterminant dans la lutte contre les incendies. C’est même la solution », renchérit Jérôme Barthès, le président de la FDSEA de l’Aude.
Or, le dernier plan national d’arrachage de la vigne prévoit la suppression de 5 000 hectares dans l’Aude, ce qui va aggraver la désertification des espaces cultivés et renforcer le risque d’incendie en créant de vastes zones de friches. Sensibilisés au risque depuis des décennies, les agriculteurs n’ont pas attendu le dernier sinistre pour agir.
Le rôle des agriculteurs dans la lutte contre les incendies
Face à l’urgence, la chambre d’agriculture a activé un numéro de crise (06 77 10 67 49) afin d’accompagner les exploitants touchés. Le recensement des pertes est en cours. « Les incendies n’étant pas reconnus comme calamités agricoles, on recommande vivement aux agriculteurs sinistrés de porter plainte contre X auprès de la gendarmerie et d’effectuer une déclaration auprès de leur assureur, à titre conservatoire », rappelle Ludovic Roux. Une association pour les agriculteurs sinistrés sera relancée afin de mobiliser des fonds.

Les actions déjà engagées en matière de défense de la forêt contre l’incendie (DFCI) seront aussi amplifiées :
- Coupures pastorales et viticoles, lancées dans les années 1980 et renforcées depuis 2019, avec la collaboration du SDIS, de la DDTM, de l’ONF et du département ;
- Ouverture des milieux ;
- Mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC).
Dix-huit éleveurs en ont bénéficié ces trois dernières années répartis dans des secteurs sensibles aux risques incendies. Toujours d’actualité, mais pas sortis des cartons, en revanche, plusieurs projets autour de la gestion de l’eau, notamment des retenues collinaires dans les Corbières.
Rémunérer les services rendus et compenser
Dans le rôle clé que joue l’agriculture sur son territoire (environnemental, économique, social, paysage, pare-feu…), les professionnels appellent à la reconnaissance des services rendus. Et la chambre d’agriculture de vouloir mettre en avant le dispositif de paiement pour services rendus dans les zones les plus exposées aux incendies. « Nous avons déjà établi une cartographie avec les massifs à protéger contre les incendies. Les deux activités les plus adaptées à cet enjeu sont la viticulture et l’élevage », souligne Ludovic Roux.
Dans la perspective de la prochaine Pac, une proposition d’indemnité compensatoire de handicap climatique (ICHC), équivalente à l’actuelle ICHN, mais adaptée aux effets du dérèglement climatique, sera défendue. L’idée serait de porter cette demande de manière coordonnée à l’échelle de l’arc méditerranéen pour en accroître la portée à Bruxelles. « Nous avons commencé à porter ce sujet à la Commission européenne, et nous le défendrons sans relâche », assure l’élu.