À l’appel de leur éleveur, une dizaine de limousines arrivent au galop, provoquant l’envol de quelques oiseaux. De nombreuses espèces ont élu domicile dans cette parcelle de marais. À côté des hérons et cigognes, une colonie de guifettes noires s’installe parfois. « On doit alors poser une clôture pour les protéger, indique Jean-Pierre. Si la colonie est très étendue, on est même forcés de sortir les vaches de la parcelle pendant toute la durée de nidification. » C’est, selon lui, la seule clause vraiment contraignante du bail environnemental que lui et son associé ont conclu avec la LPO (Ligue pour la protection des oiseaux). « Comme nous sommes limités en chargement sur les autres parcelles de marais, cela nous oblige à ramener les vaches près des bâtiments et de les affourager pendant toute cette période, qui peut durer deux mois maximum. »
Situé en Charente, le Gaec Saint-Germain exploite 250 ha de cultures et quelque 200 ha d’herbe pour 130 vaches allaitantes. Toutes les parcelles en zone de marais, autant dire la quasi-totalité de leurs prairies, font l’objet de MAEC localisées. Elles tournent autour de la gestion des engrais et du pâturage et imposent un chargement limité. « Sur ces parcelles si pauvres, il serait difficile de vivre sans MAEC », lâche l’éleveur. Même si leur paiement se fait attendre depuis des mois…
Parcelles pauvres
Sur le total des prairies, 39 ha appartiennent à la LPO, qui est venue quinze ans plus tôt leur proposer d’entretenir ces parcelles via un bail rural environnemental. Des prairies « peu exploitables », précise Jean-Pierre, sans mettre en cause les clauses du bail : interdictions de labour, de traitements et de fertilisation, chargement instantané limité au printemps, gestion du niveau d’eau dans les fossés… Certes, il faut apporter un soin particulier à l’entretien des haies, buissons et fossés et protéger la nidification des oiseaux. Pour le reste, « ces parcelles sont trop gorgées d’eau : même sans exigences formalisées, on ne pourrait pas les exploiter @différemment », lâche l’éleveur.
Le loyer demandé par la LPO est dérisoire : 48 €/ha, correspondant à l’impôt foncier augmenté de 10 %. « Pour l’exploitant, cela revient au même coût que s’il était propriétaire, sans avoir à supporter l’achat », résume Christophe Egreteau, à la LPO.
À ce prix, la possibilité d’exploiter 39 ha supplémentaires attenant à l’exploitation ne se refusait pas. Surtout quand la souscription de MAEC permet de rémunérer certaines pratiques imposées par le bail.