« Avec mes cinquante-cinq vaches, j’ai un petit système qui ne me permet pas d’avoir de matériel, ni de salarié. Je délègue donc tous les travaux des champs à la Cuma, machine et main-d’œuvre comprise. Je n’emprunte jamais de machines seules. » Producteurs de lait bio, à Pommerieux, dans le sud de la Mayenne, Jean-Paul Garrot et son épouse font appel à la Cuma des Ponts pour la fenaison, la moisson, les semis de prairie et parfois aussi pour du débroussaillage. « Les gars font environ 250 heures chez nous durant l’année », explique-t-il.
Avec ou sans salariés
Bénéficiant également d’une activité de groupement d’employeurs, la coopérative compte aujourd’hui trois salariés, dont deux à plein temps et un à mi-temps, pour au total 130 agriculteurs dont 40 adhérents très réguliers. Parmi eux, tous n’en ont pas la même utilisation : « Il existe deux types d’adhérents au sein de la Cuma des Ponts, précise Jean-Paul Garrot devenu son président. Ceux qui veulent des tracteurs de puissance et les autres qui, comme moi, délèguent une partie du travail. C’est l’avantage de la Cuma, le cadre est souple et s’adapte à nos besoins. »
Pour autant, l’organisation entre l’ensemble des adhérents et l’équipe du personnel s’effectue sur un même planning à la semaine, fixé tous les lundis matin. « Les trois salariés de la Cuma savent ainsi comment ils peuvent s’organiser pour les cinq prochains jours. Dans leur précédent boulot, ils ne le savaient que d’un jour sur l’autre. Pour nous, les agriculteurs, le document nous permet d’échanger à partir d’une assise commune et de déterminer par exemple les exploitations prioritaires de la semaine. Et ça marche ! Ce planning commun nous permet de résoudre 99,9 % des conflits. » Chaque employé est amené à travailler sur une exploitation par jour, « deux au maximum, mais pas plus ».
Une équipe polyvalente pour s’adapter à tous les besoins
« Les trois salariés sont spécialisés en polyculture, mais il arrive que l’un d’eux donne un coup de main à l’occasion sur un élevage, explique Jean-Paul Garrot. Nous avons la chance d’avoir des gars très autonomes. C’est essentiel pour répondre aux différentes demandes et aux différents systèmes d’exploitations. » Cet été, l’équipe sera renforcée par un jeune de 18 ans, « pour mener les rounds baller. C’est un garçon volontaire que nous souhaitons former plus largement, car on est bien conscient du problème de pénurie d’emploi dans notre secteur ».
Certains agriculteurs ne comprennent pas que leurs salariés aient des revenus mensuels plus importants que le leur.
Parmi les permanents, l’un travaille depuis seize ans au sein de la Cuma et les deux autres ont été embauchés récemment. « Pour leur recrutement, le bouche-à-oreille a fonctionné. L’année dernière, alors qu’un de nos salariés s’en allait, c’est lui qui a dit aux autres à quel point il faisait bon vivre chez nous. Les anciens, comme les stagiaires sont un peu des ambassadeurs, ils vont parler en bien ou en mal de ce qu’ils ont vécu sur votre exploitation, il ne faut jamais l’oublier. » Pour convaincre les deux dernières recrues à s’engager à leurs côtés, Jean-Paul Garrot a mis à plat les comptes de bilan de la Cuma, « pour qu’ils voient notre assise financière et puissent ainsi se projeter. Les deux gars travaillaient depuis plusieurs années dans une entreprise de travaux agricoles. Ça m’a semblé utile de leur apporter quelques garanties ».
Un crédit d’impôt en cas de remplacement
Pour les fidéliser, le président de la coopérative a aussi sa technique : « Nous les associons dans le processus de décision du choix de matériel. » Plus largement, Jean-Paul Garrot est soucieux de leur bon accompagnement. « C’est la clé pour que les bons restent. »
« J’ai été salarié. Je suis riche des expériences que j’ai vécues en tant que salarié. Je fais confiance aux gars. Il n’y a pas de gens au-dessus des autres. Il n’y a pas de rapport dominant et dominé. La reconnaissance du travail aussi est importante : ça ne me dérange pas de le dire quand un travail a été bien fait. Et ça n’est pas pour autant que le salarié concerné va me demander une augmentation de salaire le lendemain. Mais cela suppose aussi une bonne reconnaissance financière de son travail qui passe par un salaire de base correct. Je sais que certains agriculteurs ne comprennent pas que leurs salariés aient des revenus mensuels plus importants que le leur. Mais les salariés n’ont rien d’autres et, surtout, cela correspond au marché du travail. »
Au sein de la coopérative, chaque agriculteur paye le salarié au prorata des heures utilisées. Lorsque le salarié de la Cuma assure le remplacement de l’adhérent, ce dernier peut bénéficier du crédit d’impôt accordé au titre des dépenses de remplacement pour congé.