« C’est quelqu’un qui n’aime pas rendre des comptes, mais il ne supporterait pas non plus que je ne m’intéresse pas à son travail », explique Pierre-Yves Le Bozec au sujet de François qui travaille depuis neuf ans sur son exploitation.

Pierre-Yves Le Bozec est éleveur laitiersur la commune de Lanester, dans le Morbihan, François est salarié de Solutis emploi, le groupement d’employeurs du département. Il travaille sur deux exploitations mais principalement sur le Gaec de Kermen chez Pierre-Yves, où il réalise 1 100 heures par an, ce qui correspond à environ un trois-quarts-temps.

Le suivi au quotidien, un facteur de fidélisation

En temps normal, Pierre-Yves, associé à son épouse Emmanuelle, aurait besoin d’un quart-temps. Mais en plus d’être éleveur, le quarantenaire occupe plusieurs responsabilités à l’extérieur : il préside Solutis emploi et le service de remplacement Seremor. « Au total, je pars une centaine de jours à l’année. »

Pour lui, la solution de l’emploi partagé – la souplesse notamment du dispositif – présente un réel avantage. Mais si le groupement Solutis est bien l’employeur de François, son accompagnement au quotidien, sur l’exploitation, revient à Pierre-Yves.

« Si je partais à l’extérieur sans faire le point avec mon salarié, je pense que je le perdrais. »

« François a ses habitudes, ça fait plusieurs années qu’il vient chez moi, il a même fait son stage de découverte ici. Il connaît très bien l’exploitation. Ce n’est pas pour autant que je dois le laisser travailler seul. Il nous est indispensable d’échanger ensemble sur ce qu’il a fait ou projette de faire, c’est nécessaire pour moi comme pour lui. Si je partais à l’extérieur sans faire le point avec lui, je pense qu’il le prendrait mal – je crois même que je l’aurais perdu. Si je ne lui annonçais pas le programme de la semaine le vendredi ou le dimanche soir, il n’aimerait pas non plus. Et encore une fois, c’est normal. »

Ainsi régulièrement, Pierre-Yves Le Bozec appelle François pour faire le point de la journée et préparer le lendemain : « Ça prend trois minutes. Et seulement quand on ne s’est pas vu de la journée. On ne parle pas non plus pour ne rien dire. On échange sur ce qu’il y a à faire, on voit comment est la météo, on s’assure que le matériel est prêt. Je lui demande aussi s’il va bien. Le téléphone est un bon outil pour prendre la température. Avec mon épouse, il fonctionne par SMS. Et avec moi, c’est un coup de fil. »

Le salarié est associé à tous les projets

Entre les deux hommes, le courant passe bien depuis le départ : « Il connaît l’ensemble de l’exploitation, il a participé à tous les projets. Quand on est passé de la salle de traite au robot de traite, il a participé à la construction du projet, il a rencontré des intervenants et des conseillers, sur son temps de travail. Ça nous a fait gagner du temps. »

Les époux Le Bozec se sont lancés dans les techniques culturales simplifiées. « Auparavant, nous avions douze heures d’astreinte par jour, nous sommes passés à huit heures, on a gagné en qualité de vie. Ça nous a aussi permis de mieux répartir le temps de travail de François qui était au départ davantage consacré à l’élevage. Désormais, François est responsable de cultures. »

Le salarié vient trois jours par semaine sur l’exploitation, ainsi que deux ou trois dimanches par an. « Et s’il le faut, je l’appelle aussi durant mes vacances, ajoute Pierre-Yves. S’il en a besoin, il peut obtenir de l’aide en un appel. »

Rosanne Aries