En quoi consiste la délégation sur une exploitation ?
La délégation s’apparente à un passage de relais, une transmission à un salarié ou à un prestataire pour que, à la place de l’exploitant agricole, il accomplisse une ou plusieurs tâches sur une durée variable. Prenons l’image du bâton que l’on passe lors d’un relais sportif : en fonction de l’état de ce bâton ou de comment il est transmis (freins), le passage de témoin ne sera pas toujours optimal.
Comment caractériser le bâton transmis par l’exploitant ?
Je distingue quatre types de bâtons selon l’attitude de l’exploitant :
- Le bâton est en or : cet or symbolise le coût de cette délégation. L’exploitant avancera comme premier frein « Combien cela va me coûter ? ». Même s’il se dit prêt à déléguer, le volet financier influencera son choix.
- Le bâton tordu ou cassé : le relais se passe, mais ce n’est pas un « cadeau ». C’est le cas si les conditions de travail ne sont pas satisfaisantes. Par exemple, confier la traite des vaches nécessite d’avoir une salle de traite correctement équipée avec du matériel en bon état à disposition.
- Le bâton qui colle : certaines personnes ont plus de mal que d’autres à confier leur exploitation, leur élevage, « leur bébé ». À l’exemple de cet éleveur de porcs qui avait tout organisé (planning, procédures…) en ne laissant aux salariés plus aucune marge de manœuvre. C’est le cas aussi quand, dans le passé, la délégation s’est mal déroulée (bâtiment mal lavé par exemple). La solution est d’apprendre à faire confiance, à trouver le bon prestataire. La délégation s’appuie sur la confiance en l’autre. On peut résumer ainsi : « Je ne peux pas déléguer si je n’ai pas confiance. » Se jugeant irremplaçable, la personne n’arrive pas à confier des tâches à d’autres car, selon elle, « ça ne sera jamais aussi bien fait ». À noter qu’en cas d’accident, forcé de se faire remplacer, des solutions peuvent être trouvées et des habitudes changées (horaires de traite modifiés, à titre d’exemple).
- Le bâton de dynamite : déléguer une tâche doit se faire en toute sécurité. Le chef d’entreprise ne peut pas mettre le délégataire en danger, par exemple avec un matériel qui n’est pas aux normes.
Comment est-il transmis ?
Là encore, je poursuis l’analogie avec le passage de relais dans une course d’athlétisme. On imagine bien la façon dont ça se passe. Parfois, le bâton est passé à l’arrêt alors que le passage du flambeau nécessite une certaine dynamique, que chacun, le déléguant et le délégataire, aille dans la même direction. Lors du ramassage des volailles par exemple, si l’aviculteur ne passe pas les consignes, le prestataire ne sait pas comment gérer le chantier. Alors que si l’opération est bien préparée, le résultat sera d’autant plus efficace.
Parfois encore, le relais est passé dans le vide parce que, en face, il n’y a personne pour le prendre. L’exploitant veut bien déléguer, mais sur son territoire il n’y a personne en capacité d’exécuter le travail (Cuma, groupements d’employeurs, services de remplacement, prestataires…) ou encore la personne pressentie pour prendre le relais n’a pas les compétences.
Enfin, on voit que le bâton est passé dans la panique. À titre d’exemple, songez à l’éleveur prêt à déléguer mais qui trop occupé, qui court au champ pour ses semis et qui ne prend pas le temps de passer les informations essentielles à celui auquel il est censé déléguer le travail. Des risques d’erreurs sont à craindre.
Que peut faire l’exploitant pour mieux déléguer ?
Certains freins pourront être levés plus facilement que d’autres. Mais une fois le relais lâché, la délégation peut être source de nombreux avantages. L’exploitant va se consacrer à d’autres tâches souvent à plus forte valeur ajoutée. Les choses sont faites au bon moment, quelquefois elles sont mieux faites (outils plus performants, compétences…). Autant d’éléments qui vont contribuer à réduire la charge mentale du chef d’exploitation.