En mars et en avril 2019, les cinq salariés et le gérant de l’entreprise de travaux agricoles Taffonneau à Druyes (Indre-et-Loire) ont consacré deux jours de leur temps à mieux se connaître. Pour certains, ils travaillaient ensemble depuis vingt ans, mais ils n’avaient jamais pris le temps de s’interroger avec méthode sur leurs relations. L’intention du départ était de structurer l’entreprise mais la méthode employée a finalement été utilisée différemment pour le recrutement et le management et pour faire apparaître les points forts de l’entreprise.

L’outil MBTI pour mieux se connaître

La méthode pour mieux se connaître utilise un outil basé sur les types psychologiques des individus tels que définis par le psychanalyste suisse Carl Jung. Elle est connue en France par les acronymes MBTI.

« Le travail sur les personnalités se fait en trois parties, détaille Sophie Bidet, conseillère en ressources humaines de la chambre d’agriculture de l’Indre-et-Loire. En premier, j’analyse des personnalités spontanées à partir d’un questionnaire qui permet de mieux se connaître et de comprendre pourquoi certaines actions de management nous sont difficiles à faire. »

« Ensuite, je vérifie que le test est compris et que ses résultats sont validés par la personne concernée, poursuit-elle. Enfin, je rends la méthode concrète en mettant les équipes en situation de communication orale ou écrite, en s’en servant pour résoudre des problèmes. » Certifiée depuis 2017, Sophie Bidet a appliqué la méthode MBTI auprès de trois cents agriculteurs du département.

La méthode à l’épreuve du terrain

Quelques jours après le travail collectif sur les personnalités, Philippe Taffonneau a eu l’occasion d’utiliser cette grille d’analyse dans une situation concrète de recrutement. Il mène un entretien d’une façon habituelle mais, désormais, il ajoute des questions qui lui permettent d’analyser la personnalité du candidat : fermé ou ouvert, autonome ou collectif, meneur ou suiveur…

Avec son expérience du MBTI, il perçoit plus rapidement le type de personnalité du candidat. « Ensuite, au cours de l’entretien, on peut poursuivre l’enquête en profondeur pour vérifier cette première analyse », ajoute Philippe Taffonneau.

Ce n’est pourtant qu’un outil parmi la palette utilisée au cours de l’entretien. Pour Philippe Taffonneau, la priorité est d’abord mise sur la compétence technique, l’état d’esprit et la disponibilité. Ensuite, vient une part d’intuition qu’on ne voit plus de la même façon après avoir pratiqué le MBTI.

Ce n’est pas une garantie d’un recrutement infaillible mais, malgré tout, il est un outil intéressant aux yeux de Philippe Taffonneau parce qu’il donne les armes pour analyser les gens sous un nouvel angle.

Comprendre les personnalités

« C’est un révélateur pour soi et pour l’équipe », juge Philippe Taffonneau. Lui-même a confirmé son côté perfectionniste. Alors qu’il pouvait en être gêné auparavant, l’estimant étouffant pour les autres, il a compris que c’est ce qui lui donnait la force de répondre aux prospects sans retard, d’organiser des chantiers sans accroc même à l’autre bout de la France et de fournir des prestations appréciées par ses clients pointilleux dans le secteur des semences ou de l’industrie pharmaceutique.

Dans son management, Philippe Taffonneau tient compte désormais de la personnalité de ses interlocuteurs. « J’ai découvert que deux salariés avaient le même profil à des âges différents »,

« Mieux se connaître soi-même est le point de départ pour mieux travailler avec les autres mais le MBTI n’a pas pour objet de changer sa propre personnalité », précise Sophie Bidet.

Renforcer la polyvalence et l’expérience

La méthode MBTI appliquée à toute l’équipe a fait apparaître les points forts de l’entreprise, à savoir la polyvalence et l’expérience des salariés, alors que ces qualités étaient enfouies dans les habitudes depuis des années et considérées comme naturelles.

La motivation initiale de Philippe Taffonneau était d’utiliser le MBTI pour hiérarchiser son équipe mais la méthode, au contraire, lui a fait comprendre que ce serait aller contre la culture d’entreprise.

Éric Young