Même si la plupart des entreprises agricoles, constituant un secteur essentiel, n’ont pas arrêté de travailler durant la période du confinement, la crise a des conséquences sur leur gestion. Certains secteurs, comme l’horticulture, le maraîchage, la vigne, l’arboriculture, etc. ont été fortement pénalisés au moment où l’activité de production redémarrait.

L’employeur agricole peut prétendre à des aides. Certaines sont spécifiques à la filière, d’autres sont générales et émanent de la politique de soutien à l’économie, mise en place par le gouvernement ou par certaines Régions.

Du pouvoir d’achat pour ses salariés sans déshabiller l’exploitation

  • Les inciter à demander une aide d’Agrica : les salariés agricoles peuvent solliciter, par un mail spécifique (agricasolidaire@groupeagrica.com), une aide complémentaire auprès d’Agrica, le fonds de prévoyance du secteur agricole. Spécifiquement liée à la crise du coronavirus, l’aide d’Agrica s’élève entre 500 et 1 500 euros et s’accompagne d’une écoute personnalisée par un conseiller habitué aux questions sociales. Elle vise, par exemple, à combler une perte de revenu ou à pallier les coûts de nutrition d’un enfant qui ne peut plus manger à la cantine scolaire.
  • Les inciter à demander une aide de la MSA : une aide exceptionnelle de solidarité est mise en place par le gouvernement durant la crise liée au Covid-19. Elle est réservée aux familles les plus modestes, en particulier les foyers destinataires du revenu de solidarité active (RSA) ou de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) qui reçoivent une aide de 150 euros. Les familles qui reçoivent l’allocation personnalisée au logement (APL) reçoivent une aide de 100 euros par enfant à charge de moins de vingt ans. Les familles qui touchent le RSA ou l’ASS mais pas l’APL peuvent bénéficier d’une aide équivalente. Généralement, la MSA les a informés directement sur ce point depuis le 15 mai.
  • Leur distribuer du revenu sans cotisation sociale : la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat ou « prime Macron », mise en place à la fin de 2018 en réponse au mouvement des gilets jaunes, est reconduite en 2020. La crise sanitaire liée au Covid-19 assouplit ses conditions de versement, devenues plus contraignantes à compter de cette année. Toute entreprise peut ainsi verser jusqu’à 1 000 euros exonérés de charges sociales et d’impôts à chacun de ses salariés ayant une rémunération inférieure à trois Smic sur les douze mois précédant son versement. La prime doit être versée avant le 31 août 2020. Pour les entreprises qui ont mis en place un accord d’intéressement, le montant de la prime peut atteindre 2 000 euros. Il est rappelé que ce coup de pouce financier ne doit, en aucun cas, se substituer à un autre élément de rémunération.

Passer la période sans payer les salaires

  • Passer en activité partielle : le régime de l’activité partielle a été amplement simplifié dès le début de la crise du coronavirus. Il permet de limiter le recours aux ruptures de contrat de travail. L’employeur fait l’avance des salaires mais il est remboursé sous douze jours par l’Unédic. Le salarié en activité partielle perçoit une allocation équivalente à 70 % de sa rémunération brute antérieure, exprimée en taux horaire et multipliée au maximum par 35 heures par semaine. Cette allocation horaire ne peut pas descendre en dessous de 8,03 euros par heure chômée, sauf pour les apprentis et les contrats de professionnalisation qui étaient rémunérés en dessous du Smic. À compter du 1er mai, les salariés qui étaient en arrêt de travail pour garde d’enfants liée au Covid-19, basculent dans le régime de l’activité partielle, qui devient pour l’occasion individuelle et non plus obligatoirement collective. La gestion de l’activité partielle est possible avec la déclaration sociale normative (DSN). La demande d’activité partielle se fait par le portail Activitepartielle.emploi.gouv.fr/aparts (assistance au 0 800 705 800). Les employeurs qui utilisent le Tesa + peuvent faire leur demande directement depuis le service Tesa +.

Faire monter les salariés en compétences à moindre coût

  • Ocapiat, l’opérateur de compétences des secteurs agricole et agroalimentaire, développe, en lien avec les directions régionales de l’emploi (Direccte), un accès facilité à l’aide du FNE-formation pour les salariés placés en activité partielle. Ces salariés peuvent suivre une formation durant leur activité partielle. Sont exclus du dispositif, les alternants, les stagiaires et les salariés en arrêt de maladie ou pour garde d’enfants. Jusqu’au 31 mai, pour les formations dont le coût pédagogique est inférieur à 1 500 € TTC par salarié, la prise en charge complète dans le cadre du FNE-formation est « automatique », sous réserve toutefois que les formations suivies soient éligibles (formations non obligatoires, organismes de formation répondant aux critères qualité du décret de juin 2015…). Retrouvez les détails du dispositif sur le site d’Ocapiat.

Compenser les absences

  • Recruter rapidement : plusieurs initiatives ont émergé pour accélérer le recrutement d’employés agricoles et tenter de compenser la fermeture des frontières, empêchant ainsi la main-d’œuvre étrangère (détachement, contrats OFI, etc.) de travailler en France. La start-up Wizifarm, avec le soutien de l’Anefa et de Pôle Emploi, a mis en place la plateforme Desbraspourtonassiette.com pour recueillir des candidatures de personnes prêtes à travailler dans les champs. Le gouvernement a lancé avec Pôle Emploi une plateforme plus générale sur l’emploi durant la crise liée au coronavirus, Mobilisation exceptionnelle pour l’emploi. Spécifiquement pour les fruits et légumes, l’interprofession a ouvert aussi au début de mai sa plateforme Urgence-saisonniers.com. Le site Jobagri.com (dans le même groupe que La France Agricole Employeur) a rendu gratuit le dépôt d’annonces pour recruter des saisonniers. Il est rappelé qu’un salarié en activité partielle a le droit de travailler pendant la suspension de son contrat initial, à condition de prévenir son premier employeur en précisant le nom et la durée prévisionnelle de son emploi provisoire.
  • Se faire prêter un salarié : le prêt de main-d’œuvre est toujours possible durant la crise, y compris par des entreprises en dehors du monde agricole. Le salarié conserve son contrat initial et la totalité de son salaire. Son salaire continue d’être versé par son entreprise d’origine. Celle qui l’accueille remboursera ce salaire à l’entreprise prêteuse. Les deux entreprises doivent signer une convention entre elles et l’entreprise prêteuse doit rédiger un avenant au contrat de travail de son salarié mis à disposition. Le contrat de travail qui lie le salarié à l’employeur n’est ni rompu ni suspendu. Le salarié continue d’appartenir au personnel de l’entreprise prêteuse.
  • Recevoir un bénévole : durant la crise du coronavirus, des candidats font cette demande, mais l’activité bénévole pour travailler sur une exploitation, nonobstant l’entraide familiale ou celle entre agriculteurs, est très peu sécurisée juridiquement aussi bien pour le bénévole que pour l’exploitant.
  • Bénéficier du service de remplacement : une aide spécifique a été créée pour les exploitants (non-salariés agricoles) qui font appel au service de remplacement ou qui embauchent pour des motifs spécifiques à la crise du coronavirus (maladie, garde d’enfants). L’aide se monte au maximum à 112 euros par jour. Elle est versée, soit à l’exploitant, soit au service de remplacement selon les cas, par les caisses de MSA auprès de qui l’exploitant doit adresser sa demande.

Reporter les échéances

  • Report du paiement de la dette sociale : des délais de paiement peuvent être accordés aux entreprises qui rencontrent des difficultés de paiement de leur dette sociale (part patronale) et fiscale. La demande se fait à la commission des chefs de services financiers de la Direction des impôts.
  • Report des échéances sociales : en avril et en mai, la Mutualité sociale agricole (MSA) a adapté son échéancier de paiement des cotisations sociales. Celles de mai peuvent être reportées sans pénalité en juin. Pour les employeurs en DSN jusqu’au 15 mai, les modalités diffèrent selon le mode de paiement : les prélèvements seront faits par la MSA à hauteur du montant que l’employeur indique dans le bloc « paiement » de la DSN ; les virements sont ajustés par l’employeur lui-même ; en revanche, les télérèglements ne permettent pas l’ajustement. Pour les employeurs en Tesa +, l’échéance du 7 mai 2020 indiquée sur la facture de cotisations sociales est reportée au 30 juin 2020. Enfin, pour les employeurs en Tesa simplifié, l’appel de cotisations de mai sera en réalité effectif au 30 juin 2020.
  • Report du versement de l’intéressement : la date limite du versement des éventuels intéressements ou participation des salariés a été reportée au 31 décembre 2020.
Eric Young et Bertille Quantinet