Face au Covid-19, aucun fléau sanitaire et social n’est de taille. Pourtant, une « pandémie » d’un autre genre est à l’œuvre depuis plus de trente ans.

Si le terme peut interroger au regard de la situation inédite que nous vivons, c’est ainsi, en effet, que les troubles musculo-squelettiques (TMS) sont qualifiés par l’Institut syndical européen pour la recherche, l’éducation et la santé et sécurité (Etui-Rehs) : « Face à la pandémie des troubles musculo-squelettiques aujourd’hui avérée, les acteurs sociaux, politiques et économiques doivent tactiquement s’unir dans une guerre sans merci contre leurs facteurs de risque », écrivait, en 2007, Roland Gauthy, chercheur à l’institut européen. Constat similaire, huit ans plus tard, de son collègue Yves Roquelaure : « Les enquêtes sur les conditions de travail montrent une épidémie d’ampleur beaucoup plus importante : environ 50 % des travailleurs européens en souffrent. »

Ces affections périarticulaires, qui se traduisent, par crise ou de manière chronique, en lombalgies, en syndromes du canal carpien (face interne du poignet), en tendinites, etc., sont enregistrées comme « la première cause de maladie professionnelle » en France comme en Europe.

« Le mal du siècle », dont le coût représente environ un treizième mois pour un employeur, n’épargne pas le monde agricole : 93,3 % des maladies professionnelles du secteur se révèlent être des TMS.

Pourtant, parfois sur la seule base de gestes ou d’adaptations techniques simples, le fléau est maîtrisable. Les mesures de prévention, taxées souvent de coûteuses et de chronophages, présentent l’avantage d’agir sur la santé. Elles se révèlent être aussi de précieux facteurs d’efficacité et de fidélisation des salariés, comme en témoignent, dans ce dossier, un couple de maraîchers de l’Indre et un éleveur breton de porcs, qui les ont adoptées chacun à leur façon.