En quoi l’École de guerre économique s’intéresse à l’agriculture ?

Depuis vingt-sept ans, l’École de guerre économique et son centre de recherche, le CR451, ont rédigé plusieurs rapports sur l’agriculture française. Les deux derniers datent de la fin de 2024. L’un dénonce les réseaux de financement américains des organisations animalistes. Le deuxième, intitulé « La guerre économique dans l’agriculture », fera l’objet d’un documentaire d’une heure trente minutes qui sera diffusé en février sur notre site internet et notre chaîne YouTube.

De quoi traitent-ils plus précisément ?

Nous y expliquons que l’agriculture joue un rôle géostratégique de premier plan. Ce secteur, particulièrement complexe notamment par sa multiplicité de filières et de productions, est très exposé aux logiques de guerre économique. Certains pays européens, très compétitifs sur les coûts de production et la recherche agronomique, utilisent des pratiques déloyales, comme le dumping social, pour défendre les intérêts de leur agriculture. On note aussi des déstabilisations de la part de puissances agricoles mondiales comme les États-Unis. Il semble que l’agriculture française subit la guerre économique plus qu’elle ne la pratique.

En pointant du doigt les forces et faiblesses de notre agriculture, quels sont vos objectifs ?

Le but est double : réveiller la nécessité d’un cœur stratégique pour l’agriculture française, et faire apparaître un mouvement citoyen de soutien au monde agricole. Sur le premier point, aujourd’hui, l’agriculture est une somme d’intérêts particuliers incapables de se mettre d’accord pour savoir en quoi elle représente un enjeu stratégique pour la France.

Il manque une concertation entre les différents secteurs agricoles pour redéfinir en quoi l’agriculture représente une priorité nationale : pour nourrir sa population et entretenir les paysages bien sûr, mais pas que. Il faut créer un comité stratégique représentatif de tous les intérêts. Cette première démarche du monde agricole sera un point d’ancrage pour une nécessaire prise de conscience de la part de la population citoyenne. Il est essentiel que le monde non agricole soutienne les agriculteurs.

Quels sont les enjeux ?

À ce jour, l’agriculture française peut aussi bien rebondir que sombrer. Faire preuve de résilience face au changement climatique d’une part, à la volatilité des marchés et des charges d’exploitation d’autre part, et intégrer les nouvelles générations dans la mutation de l’agriculture : ces trois enjeux mettent en avant la nécessité de prendre en compte les spécificités sociétales et territoriales de l’agriculture française, et d’accepter pleinement que l’agriculture soit le champ de bataille d’une guerre économique. Le politique et les marchés doivent s’adapter à ces spécificités, et non l’inverse. La France doit donner une orientation à son agriculture et notamment autoriser les importations de produits que si elles respectent les règles françaises, ou du moins européennes.

Plus que jamais, il semble important de considérer cette guerre économique et de donner les outils indispensables pour jouer dans cet environnement, qui n’est pas des plus familiers pour le monde agricole.

(1) Fondée en 1997 à Paris, l’EGE est un établissement d’enseignement supérieur privé, spécialisé dans l’intelligence économique.